RecensĂ© Patrice Gueniffey, Bonaparte, Gallimard 2013. 864 p., 30âŹ. Dernier titre sur lâinterminable liste des biographies consacrĂ©es Ă NapolĂ©on Bonaparte, le livre de Patrice Gueniffey nâest pas une Ćuvre de circonstance contrairement aux ouvrages rĂ©cemment parus en français ou en anglais, Ă lâoccasion dâun bicentenaire qui ne sâachĂšvera quâen 2015. Depuis 2004, lâauteur souhaitait achever ce que son maĂźtre, François Furet, nâavait fait quâamorcer une vie de NapolĂ©on. Contre la tendance actuelle qui dĂ©laisse lâindividu au profit des grandes fresques dâune Ă©poque et privilĂ©gie lâĂ©tude du fonctionnement des institutions impĂ©riales en France et en Europe â la derniĂšre en date Ă©tant celle dâAurĂ©lien Lignereux sur lâEmpire des Français Seuil, 2013 â Gueniffey entend bien revenir Ă la biographie et retracer les splendeurs et misĂšres dâune existence hors du commun. Certes, lâĂšre de lâhĂ©roĂŻsme guerrier dont Bonaparte se faisait lâĂ©tendard est actuellement dĂ©modĂ©e, mais le personnage incarne aussi lâindividualisme moderne par sa foi dans le pouvoir de la volontĂ©. Le condottiere Le premier volet de cette biographie porte sur les annĂ©es 1769-1802, ce qui permet Ă lâauteur de dĂ©crire lâascension fulgurante dâun jeune Corse que rien ne prĂ©destinait Ă conquĂ©rir la France, puis lâEurope. Lâobjectif visĂ© est de saisir le moment oĂč lâhomme â ici Bonaparte â sait Ă jamais qui il est » Borges. Ce nâest certes pas dĂšs sa naissance quâil en devient conscient ; ni mĂȘme durant lâenfance. Gueniffey insiste bien sur cette enfance et sur le fait que Bonaparte a trĂšs tĂŽt Ă©tĂ© acculturĂ©. Il nie Ă juste titre la pertinence des analyses dĂ©terministes qui voudraient que Corse, lâon soit nĂ©, et Corse, lâon demeure ». Par la grĂące de ses Ă©tudes et lâĂ©loignement sur le continent, le jeune garçon sâest rapidement francisĂ©. Son intĂ©rĂȘt ultĂ©rieur pour lâĂźle de BeautĂ© participerait tout au plus dâune mĂ©lancolie pour un passĂ© Ă jamais Ă©vanoui â ranimĂ© peut-ĂȘtre par lâĂ©crit de Rousseau sur le Projet de Constitution pour la Corse de 1765. Par ailleurs, son admiration pour Paoli peut se comprendre par la cĂ©lĂ©britĂ© de ce compatriote et les rĂ©formes Ă©clairĂ©es quâil a introduites dans leur pays natal. Entre 1755 et 1769, la Corse en effet a vĂ©cu une rĂ©volution, qui prĂ©cĂšde donc celles qui vont bientĂŽt bouleverser le monde occidental. Mais, et lâon sâaccordera volontiers avec lâauteur, la constitution de Paoli nâĂ©tait pas si dĂ©mocratique quâon lâa dit. ComposĂ© de quelque 9 pages, Ă©numĂ©rant les principes constitutifs du gouvernement, ce texte avait surtout pour but de fonder lâautoritĂ© sur le consentement de tous » p. 38. La diĂšte, Ă©lue dĂ©mocratiquement, reprĂ©sentait le peuple souverain, mais le pĂšre de la patrie », le gĂ©nĂ©ralissime Pascale Paoli, Ă©tait inamovible et concentrait tous les pouvoirs. Cette habile, mais trompeuse, construction ferait-elle date ? Notamment aprĂšs le coup dâĂtat du 18 Brumaire ? Le consulat Ă vie de Bonaparte sâen serait-il inspirĂ© ? Lâauteur ne le dit pas, mais nâanticipons pas. Bonaparte demeure en vĂ©ritĂ© un garçon ordinaire jusquâĂ la campagne dâItalie. Câest celle-ci qui lui dĂ©voile son gĂ©nie et le rĂ©vĂšle Ă lâEurope stupĂ©faite â et non le siĂšge de Toulon, qui lui valut un titre de gĂ©nĂ©ral de brigade, mais non la notoriĂ©tĂ©. En six mois, le jeune gĂ©nĂ©ral a conquis la pĂ©ninsule. Il fait mieux. Il la rĂ©volutionne et crĂ©e des rĂ©publiques-sĆurs. Câest dire quâil met en pratique des talents quâil ne soupçonnait pas jusque-lĂ et qui nâavaient rien de militaire. De lĂ ses propos ultĂ©rieurs sur la nĂ©cessitĂ© de marier tout Ă la fois la force des armes et celle de lâesprit. De lâesprit, il nâen manque pas. Sachant sĂ©duire ceux dont il a besoin, refuser les ordres qui lâindisposent, imposer ses idĂ©es aux contemporains, Bonaparte dĂ©couvre Ă©galement son charisme et son autoritĂ©. En Ăgypte, il dĂ©couvre aussi lâinhumanitĂ© de lâhomme, ce qui confirme ses lectures de Machiavel sur la fonciĂšre mĂ©chancetĂ© humaine et le dĂ©tache dĂ©finitivement de Rousseau. DĂšs lors, il adopte un comportement qui paraĂźt calquĂ© sur les conseils formulĂ©s dans le Discours sur la premiĂšre dĂ©cade de Tite-Live. Gueniffey suggĂšre en effet quâil fut un des meilleurs Ă©lĂšves du Florentin. Câest fort possible. Les Ćuvres de ce dernier figuraient en bonne place dans ses bibliothĂšques successives. Au XIXe siĂšcle, dĂ©tracteurs et admirateurs nâhĂ©sitaient pas dâailleurs Ă rapprocher le HĂ©ros » de la figure du condottiere. Tel Stendhal Suivant moi, on ne trouve dâanalogue au caractĂšre de NapolĂ©on que parmi les condottieri et les petits princes de lâan 1400 en Italie [...] Hommes Ă©tranges, non point profonds politiques [...] faisant sans cesse de nouveaux projets, Ă mesure que leur fortune sâĂ©lĂšve, attentifs Ă saisir les circonstances et ne comptant dâune maniĂšre absolue que sur eux-mĂȘmes. Ămes hĂ©roĂŻques nĂ©es dans un siĂšcle oĂč tout le monde cherchait Ă faire et non pas Ă Ă©crire » [1]. Câest bien cet homme dâaction, indiffĂ©rent aux notions conventionnelles de bien et de mal, que reconstitue patiemment lâauteur tout au long des centaines de pages qui constituent le prĂ©lude Ă la prise de pouvoir et Ă lâascension suprĂȘme. Quelle pĂ©riode autre que la RĂ©volution aurait-elle Ă©tĂ© plus propice Ă un jeune militaire de petite noblesse pour accĂ©der au gĂ©nĂ©ralat et au gouvernail de lâĂtat â exceptĂ© la Renaissance italienne ? SĂ»rement pas lâAncien RĂ©gime oĂč les rangs ne sâacquĂ©raient dans lâarmĂ©e quâavec les quartiers de noblesse, et oĂč le pouvoir suprĂȘme Ă©tait entre les mains dâun souverain hĂ©rĂ©ditaire. Pour que se modifie tout cela, il fallut rien moins quâune rĂ©volution. Jamais dans lâhistoire, la mobilitĂ© sociale ne fut Ă ce point chamboulĂ©e. La mĂ©ritocratie rĂ©volutionnaire avait changĂ© la donne. Le fils de la RĂ©volution NapolĂ©on Bonaparte nâaurait jamais Ă©tĂ© celui quâil est devenu si lâĂ©poque nâavait Ă©tĂ© si extraordinaire et si ouverte aux talents. Câest la RĂ©volution qui le crĂ©e, mais elle le crĂ©e comme rĂ©volutionnaire. Vu sous cet angle, le militaire Ă©duquĂ© Ă lâĂ©cole dâAncien RĂ©gime a su choisir son camp. Gueniffey note bien sa sympathie pour le clan robespierriste, sans pour autant amplifier un jacobinisme qui nâaurait durĂ© que le temps dâun Ă©tĂ© â celui du Souper de Beaucaire de 1793 â Ă lâheure de la patrie en danger [2]. De fait, au moment de ses premiĂšres prouesses, Bonaparte aurait Ă©tĂ© tout Ă la fois rĂ©volutionnaire et postrĂ©volutionnaire p. 254. RĂ©volutionnaire en raison de sa jeunesse, de son volontarisme et de ses principes â avant tout lâĂ©galitĂ©. PostrĂ©volutionnaire en ce quâil incarne, comme lâarmĂ©e avec lui, la RĂ©volution sans la guerre civile. Il serait le fils de la nation en guerre, et non de la politique » p. 255. Dans la premiĂšre phase de sa carriĂšre, câest parce quâil marche dans le sens de la RĂ©volution quâil devient ce quâil est le hĂ©ros italique qui a libĂ©rĂ© lâItalie et civilisĂ© lâĂgypte. DĂšs lors, sa renommĂ©e devient gĂ©nĂ©rale. Le retour dâĂgypte et le voyage triomphal de FrĂ©jus Ă Paris en tĂ©moignent plutĂŽt bien, tout comme les piĂšces de théùtre qui chantent le HĂ©ros de retour. Personne, cependant, ne sâattend Ă le voir sâemparer du pouvoir. Ă la mĂȘme date, câest sur SieyĂšs que reposent les espoirs dâun remaniement efficace des institutions rĂ©publicaines. Nul nâappelait un Sauveur, surtout pas militaire. Tout au plus un bon lĂ©gislateur tel quâest alors perçu lâabbĂ© SieyĂšs. De mĂȘme, on peut lĂ©gitimement douter que le Directoire ait Ă©tĂ© au bord du gouffre » p. 449 câest lĂ une belle image, mais peu crĂ©dible. Que des rĂ©formes aient Ă©tĂ© envisagĂ©es ne signifie pas en effet que les rĂ©formistes aient voulu renverser le rĂ©gime. Il est vrai que la Constitution de lâan III interdisait des modifications avant 1804. Mais un moyen terme Ă©tait envisageable. Lâagonie du Directoire », titre dâun chapitre de la cinquiĂšme partie, est toute relative, dâautant que la situation sâest amĂ©liorĂ©e au cours de lâautomne 1799 vaincues durant lâĂ©tĂ© par la coalition antirĂ©volutionnaire, les armĂ©es françaises ont repris le dessus ; les rĂ©formes entreprises du point de vue financier et du point de vue de lâordre public commencent Ă porter leurs fruits, etc. Gueniffey ne le conteste pas, mais reproche au Directoire de ne pas avoir fait aboutir plus rapidement ces rĂ©formes. Selon lui, les Français seraient soucieux avant tout de conserver les acquis de la RĂ©volution, mais mĂ©priseraient leur gouvernement et ses institutions dĂ©biles » p. 457. Et pourtant, ce sont pour une grande part ces institutions que Bonaparte va parachever. Il y a ici une contradiction certaine. Et ce nâest pas la seule, puisque Gueniffey affirme tout dâabord que les Français souhaitaient le retour Ă une forme de pouvoir absolu, sinon de droit divin » p. 254, tandis que plus loin, ces mĂȘmes Français voient sâĂ©crouler la RĂ©publique sans pour autant croire que la monarchie put la remplacer avantageusement » p. 456 ? Attendaient-ils un sauveur inĂ©dit ? Un roi dâun genre nouveau » p. 457 ? Toute histoire ou biographie du Premier Empire bute sur ce point. Le Bonaparte de Gueniffey ne fait pas exception. Lâadmiration lĂ©gitime pour les exploits de Bonaparte ne veut pas dire que les Français envisageaient un changement de rĂ©gime avec Ă sa tĂȘte un petit gĂ©nĂ©ral. On connaissait sa rĂ©putation de soldat, mais qui Ă©tait au courant de lâexpĂ©rience civile et politique acquise en Italie et en Ăgypte ? Les contemporains de Bonaparte nâavaient pas lâexpĂ©rience que nous avons â du gouvernement de PĂ©tain Ă celui de de Gaulle â et ne pouvaient soupçonner le gĂ©nie organisateur et administratif du gĂ©nĂ©ralissime. Depuis dix ans, la politique avait Ă©tĂ© entre les mains de reprĂ©sentants Ă©lus par le peuple. La participation aux Ă©lections avait certes chutĂ©, mais ceux qui sây rendaient Ă©taient hautement motivĂ©s. Le Directoire Ă©tait moins dĂ©mocratique que les rĂ©gimes prĂ©cĂ©dents, et encore nâavait-il pas introduit un suffrage au premier degrĂ© plus large que celui de la Constituante ? Les Ă©tudes de Bernard Gainot et de Pierre Serna [3] dĂ©montrent en tout cas que la vie politique de la France Ă©tait loin dâĂȘtre morne. On pouvait Ă©videmment reprocher au Directoire de fouler aux pieds la volontĂ© nationale quand les rĂ©sultats des Ă©lections ne lui convenaient pas, ainsi quâen tĂ©moignent les coups dâĂtat de fructidor an V et de florĂ©al an VI, qui ne menaient pas du reste Ă des rĂ©pressions sanglantes, tout au plus Ă quelques dĂ©portations. Les avis sâaccordent par ailleurs pour reconnaĂźtre que les conditions de vie du peuple sâĂ©taient fort amĂ©liorĂ©es et que les subsistances Ă©taient bon marchĂ© [4]. LâannĂ©e 1799, câest vrai, fut une nouvelle Ă©preuve pour la RĂ©publique. Les Ă©lections avaient Ă©tĂ© favorables aux Jacobins ce qui ranimait la crainte dâun retour au gouvernement de lâan II, quâallaient stimuler les dĂ©faites infligĂ©es Ă la France en Italie, en Suisse et sur le Rhin. Il fut question en effet de levĂ©e en masse, de loi des otages, dâemprunt forcĂ©, de patrie en danger p. 450. Le club des Jacobins rouvrit ses portes, mais ne sut ressusciter lâesprit de lâan II. Quelques semaines plus tard, le nouveau ministre de la Police, FouchĂ© qui nâĂ©tait certes pas un modĂ©rĂ©, les faisait fermer. Ce brouhaha nâavait pas de quoi inquiĂ©ter lâensemble des Français. Ătaient-ils mĂȘme au courant ? Rien de moins certain. Il est vrai aussi quâĂ Paris mĂȘme, le Directoire Ă©tait critiquĂ©, mais comme tout gouvernement peut lâĂȘtre par des citoyens quels quâils soient. DâaprĂšs Von Humboldt, de visite dans la capitale, il lâĂ©tait avant tout dans les lieux autrefois frĂ©quentĂ©s par la cour [5]. Que dire de plus Ă ce sujet sinon quâil est imprudent de conclure Ă lâimpopularitĂ© dâun rĂ©gime Ă la lumiĂšre de ce qui suit, surtout quand cela sâopĂšre par la force et la contrainte. Câest la question qui se pose devant des assertions qui demanderaient Ă ĂȘtre sĂ©rieusement motivĂ©es. Le dictateur consulaire Le pouvoir ne fut pas donnĂ© Ă Bonaparte. Il lui fallut sâen emparer » p. 461. Lâauteur admet donc que la popularitĂ© du hĂ©ros nâentraĂźna pas sa nomination au sommet de lâĂtat. Une vĂ©ritable conjuration vit le jour qui rendit possible le renversement dĂ©finitif du Directoire. SieyĂšs y participait avec lâidĂ©e de modifier la Constitution de sorte que le gouvernement soit plus efficace. Lui non plus ne visait pas Ă porter au pouvoir suprĂȘme un dictateur, ni mĂȘme un prĂ©sident de la RĂ©publique sur le mode amĂ©ricain. Il conservait aux corps lĂ©gislatifs Tribunat et Corps lĂ©gislatif une place de choix, mais ceux-ci nâĂ©taient plus Ă©lus directement par des Ă©lecteurs. Ils Ă©taient choisis par le SĂ©nat â ou CollĂšge des Conservateurs. Le chef de lâĂtat, nommĂ© Ă vie, Ă©tait dotĂ© dâune fonction purement honorifique. On sait ce quâil advint. Une fois le coup dâĂtat effectuĂ©, Bonaparte fit pression sur ses acolytes et rĂ©ussit Ă reprendre le contrĂŽle des discussions et des dĂ©cisions. Le rĂ©sultat en fut une constitution bien diffĂ©rente de celle prĂ©vue par lâabbĂ©. Il revint Ă Necker de dĂ©mystifier la mystification quand il constata quâaprĂšs le coup dâĂtat du 18 Brumaire, la RĂ©publique française nâĂ©tait plus quâune fiction puisque la nation Ă©tait dĂ©pouillĂ©e de ses droits politiques et que les corps constituĂ©s ne pouvaient plus communiquer avec lâopinion publique. Il nây aurait que le Premier Consul Ă sortir armĂ© de la tĂȘte du lĂ©gislateur ». Gueniffey le reconnaĂźt, mais accepte placidement ces changements parce quâils permettraient dâaccĂ©lĂ©rer les rĂ©formes et de terminer enfin la RĂ©volution. Un des chapitres est mĂȘme intitulĂ© Le dernier jour de la RĂ©volution ». Cela ne veut pas dire que Bonaparte renonce Ă ses acquis. Le Premier Consul entend bien les perpĂ©tuer et les fixer dans le marbre des lois. Ici encore, il est tout Ă la fois rĂ©volutionnaire et postrĂ©volutionnaire. Ă cette grande diffĂ©rence prĂšs, qui semble ne pas gĂȘner lâauteur, que sây surimpose le dictateur. Dictature ferme, judicieuse et bienfaisante », selon Lacretelle p. 534, grĂące Ă laquelle quatre mois suffisent pour introduire des rĂ©formes que cinq annĂ©es de paralysie directoriale » nâont pas su mener Ă bien Caisse dâamortissement, Banque de France, administration des contributions directes, systĂšme prĂ©fectoral et rĂ©organisation du systĂšme judiciaire. Et surtout, grĂące au monopole de la dĂ©cision » qui lui est imparti, Bonaparte peut sâattacher Ă rationaliser et renforcer lâĂtat p. 586. Il sait faire mieux encore et se couler dans la figure du despote Ă©clairĂ© si typique du XVIIIe siĂšcle. Pour Gueniffey, rien de contradictoire dans la prĂ©sence en un seul homme de ces influences diverses et variĂ©es la nature du rĂ©gime consulaire serait rĂ©publicaine ; la forme monarchique, et les mĂ©thodes de travail dignes dâun Joseph II ou du Grand FrĂ©dĂ©ric. Sous le Consulat, Bonaparte rĂ©ussirait donc Ă faire fusionner en lui les tendances les plus opposĂ©es du siĂšcle. Le terroriste Tout cela provoque Ă©videmment des rĂ©sistances, et partant, des mesures coercitives. Câest le volet moins brillant de la politique consulaire, celui quâon met peu volontiers en valeur. Non seulement Bonaparte souhaite dĂšs 1799 Ă©liminer les derniers des Jacobins â trente-quatre auraient dĂ» ĂȘtre dĂ©portĂ©s mais, devant le tollĂ© que cela suscita, ils furent seulement assignĂ©s Ă rĂ©sidence â mais il ne tolĂšre aucune opposition. La libertĂ© de la presse qui Ă©tait si chĂšre Ă la RĂ©volution laquelle lâavait certes violĂ©e Ă plusieurs reprises est muselĂ©e. Dans les dĂ©partements, des commissions militaires et des tribunaux dâexception font rĂ©gner la terreur. Lâhistorien amĂ©ricain Howard Brown a calculĂ© quâen lâan IX, pas moins de 1 400 Ă 1 500 personnes furent exĂ©cutĂ©es et, en lâan X, quelque 900 Ă 1 000 individus. Bonaparte rĂȘvait de remplacer lâanarchie » rĂ©volutionnaire par lâordre et lâautoritĂ©, mais il ne sut y parvenir quâen usant des moyens propres Ă lâĂ©poque si dĂ©criĂ©e de la terreur. Il Ă©changea la rĂ©pression incontrĂŽlĂ©e de lâan II contre une rĂ©pression contrĂŽlĂ©e dâen haut, qui nâĂ©tait pas moins arbitraire. Gueniffey nâinsiste pas assez sur ce point. Et câest dommage, dâautant que la rĂ©pression ne faiblira pas tout au long du rĂšgne. En 1810-1811, par exemple, les bulletins de police signalent la prĂ©sence dans les diverses prisons parisiennes de 4 500 Ă 4 700 personnes [6]. Encore Paris nâest-il plus le centre exclusif de la rĂ©pression comme il en allait en lâan II. Sây ajoutent au fil des ans le fort de Ham, le chĂąteau dâIf, la forteresse de FĂ©nestrelles, la Corse, etc. Tout cela concerne Ă©videmment le second volume Ă paraĂźtre sur lâEmpire. On aurait mauvais grĂ© Ă reprocher Ă lâauteur de ne pas lâavoir traitĂ© dans le premier. Tout au plus aurait-il pu noter lâintense coercition qui visait Ă pacifier les dĂ©partements. Car la terreur consulaire se donne pour objectif de restaurer lâordre et lâautoritĂ©. Le pacificateur Une fois restaurĂ© cet ordre en VendĂ©e et dans le Midi, Bonaparte rĂ©ussit Ă pacifier les querelles religieuses en signant le Concordat. Le chapitre qui y est consacrĂ© est particuliĂšrement intĂ©ressant et illustre la thĂšse principale du livre sur la force de la volontĂ©. Bonaparte y consacre en effet des jours et des mois, ne se laisse rebuter par aucun obstacle et tient tĂȘte Ă tous ceux qui sây opposent. De mĂȘme, dĂšs 1801, il repense les relations avec lâAmĂ©rique et avec les colonies et envisage de reconstituer un empire colonial â vouĂ© Ă lâĂ©chec, on le sait. Ce passage permet Ă Gueniffey dâĂ©tudier et de nuancer la position de Bonaparte vis-Ă -vis de lâesclavage. Il lâaurait rĂ©introduit par pragmatisme, et non par antipathie vis-Ă -vis des Noirs p. 595-599. Enfin, le retrait de William Pitt de la scĂšne publique donne lâoccasion au Premier Consul de conclure la paix avec lâAngleterre. Une paix qui ne pouvait ĂȘtre durable, puisquâelle permettait Ă la France de naviguer sur les mers, de reconstituer son empire, et de devenir un danger pour la suprĂ©matie maritime britannique. Bonaparte en Ă©tait conscient, mais ne fit rien pour amadouer la principale rivale de la France. Il en profita pour accroĂźtre son pouvoir en Europe et entreprendre des expĂ©ditions en Orient et aux AmĂ©riques. ParallĂšlement sâachevait la rĂ©daction du Code civil, dont NapolĂ©on sâattribuera lâentiĂšre paternitĂ© â alors que les premiers projets datent de 1793. Mais par son inflexible volontĂ©, ici encore, il termina ce que la RĂ©volution nâavait pu achever. Ceci et cela expliquent la conclusion de ce volet de la vie de Bonaparte. Ă savoir que jamais plus on ne le reverra faire un usage si judicieux de son gĂ©nie et de sa force » p. 683. Il en est rĂ©compensĂ© par le Consulat Ă vie qui le transforme en monarque â sans le titre ». Conclusion intrigante en un sens, parce quâelle annonce une dĂ©cadence paradoxale celle du Grand Empire. Ă ce stade, lâauteur a dĂ©laissĂ© Machiavel et les influences quâil avait bien pu exercer sur le hĂ©ros. Et pourtant ! Bien des rĂ©formes entreprises sur le plan de la religion, des institutions, de lâordre public, de la cour et des apparences, de la terreur salutaire Ă infliger aux opposants, de lâautoritĂ© que doit afficher le dictateur nouveau ou sur le plan militaire â notamment la parade hebdomadaire qui rappelait aux Français son statut de roi de guerre » â semblent autant de mises en pratique des conseils que distribuait quelques siĂšcles plus tĂŽt le penseur florentin. Stendhal aurait-il donc eu raison ? DerriĂšre lâhĂ©ritier des LumiĂšres et de la RĂ©volution semble bien se cacher un condottiere de la Renaissance le prince de Machiavel, hors normes et amoral.
Promouvoirla RĂ©volution nationale. La dĂ©faite face Ă l'armĂ©e allemande (mai-juin 1940) signe la fin de la III e RĂ©publique et la naissance de l'Ătat français dirigĂ© par le MarĂ©chal PĂ©tain (10 juillet 1940). Soucieux dâasseoir sa lĂ©gitimitĂ© et de promouvoir ses principes, le nouveau pouvoir a recours Ă une propagande tous azimuts qui vante notamment les mĂ©rites de laRĂ©sumĂ© Index Plan Notes de la rĂ©daction Texte Notes Citation Auteur RĂ©sumĂ©s Lâhistoire algĂ©rienne officielle enseigne que le Front de libĂ©ration nationale fut rĂ©volutionnaire. De fait, il incarna en paroxysme terminal le refus de la domination Ă©trangĂšre et il conduisit une guerre populaire rurale. Mais, au vrai, les projets quâil dessina pour lâaprĂšs ,indĂ©pendance se limitĂšrent pratiquement Ă lâĂ©mancipation nationale â par un retour aux sources culturelles assez souvent frottĂ© de rĂ©fĂ©rences traditionalistes, par le recours Ă lâindustrialisation, et plus largement par lâinvestissement dans un modernisme technophile bien distant dâune modernitĂ© renvoyant Ă des changements culturels en profondeur qui ne furent jamais dĂ©cisivement promus. Il y eut toutefois des analyses et des projets dâallure rĂ©volutionnaire, mais ils furent toujours marginaux et produits Ă huis rĂ©volution » du FLN ne se disjoignit pas des rĂ©flexes traditionnels du communautarisme. Elle fut scandĂ©e au sommet, surtout Ă titre de rhĂ©torique instrumentale dans le segment militaire finalement triomphant, lâĂ©tat,major gĂ©nĂ©ral, dirigĂ© par le colonel Boumediene dans lâentreprise de conquĂȘte du pouvoir. Au total, le FLN ne fut guĂšre rĂ©volutionnaire si lâon veut dĂ©passer la simple acception dâune rĂ©volution anticoloniale, et pour peu que lâon considĂšre les diffĂ©rences de sens entre thawra en arabe et rĂ©volution en français. Le FLN ne fut pas un front rĂ©volutionnaire. Il fut un front de rĂ©sistance. Official Algerian history teaches that the national Liberation Front was revolutionary. It is a fact, it incarnates the refusal of foreign domination in a final paroxysm and it leads to a popular rural warfare. But really, the plans that it draws up for after independence were practically limited to national freedom with a return to cultural origins often enough involving traditional references, with recourse to industrialization and to a greater extent to investment in technical modernism well distant from a modernity going back to deep cultural changes which were never decisively promised. There were however analyses and plans of revolutionary nature, but they were always marginal and produced behind closed doors. The FLN revolution didnât separate itself from traditional communal reactions. It was scanned at the summit especially by virtue of instrumental rhetoric in the final triumphant military section, the General Headquarters, directed by colonel Boumediene in the conquest of power. In all, the FLN was hardly revolutionary if one wants to go beyond the simple acceptance of an anti colonial revolution even if one considers the differences of meaning between thawraâ in Arabic and Revolution in French. The FLN was not a National Revolutionary front. It was a resistance front. La historia argelina oficial enseña que el Frente de la LiberaciĂłn Nacional fue revolucionario. De hecho encarna en paroxismo terminal el rechazo de la dominaciĂłn extranjera y condujo una guerra popular rural. Pero, en realidad, los proyectos que dibujĂł para despuĂ©s , independencia se limitaron prĂĄcticamente a la emancipaciĂłn nacional â por un retorno a las fuentes culturales a menudo frotado con referencias tradicionalistas, por el recurso a la industrializaciĂłn, y mĂĄs ampliamente por la inversiĂłn en un modernismo tecnofilo muy distante de una modernidad incitando a los cambios culturales en profundidad que nunca fueron decisivamente promovidos. Hubo, sin embargo, anĂĄlisis y proyectos de paso revolucionario, pero fueron siempre marginales y producidos a puerta cerrada. La ârevoluciĂłnâ del FLN no se desjuntĂł de los reflejos tradicionales del comunitarismo. Fue conformada en la cumbre sobre todo con titulo de retĂłrica instrumental en el segmento militar finalmente triunfante, el Estado mayor general, dirigido por el coronel BoumediĂšne en la empresa de conquista del poder. En total, el FLN casi no fue revolucionario si queremos sobrepasar la simple aceptaciĂłn de una revoluciĂłn anticolonialista, y por poco que consideramos las diferencias de sentido entre thawra en ĂĄrabe y revoluciĂłn en francĂ©s. El FLN no fue un frente revolucionario. Fue un frente de resistencia. ÙŰčÙÙ Ű§ÙŰȘۧ۱ÙŰź ۧÙŰŹŰČŰ§ŰŠŰ±Ù Ű§ÙŰ±ŰłÙ Ù ŰčÙÙ ŰŁÙ ŰŹŰšÙŰ© ۧÙŰȘŰ۱Ù۱ ۧÙÙŰ·ÙÙ ÙۧÙŰȘ Ű۱ÙŰ© Ű«Ù۱ÙŰ©. Ù ÙÙ۰ۧ ÙÙŰŻ ŰȘۏ۳ۯŰȘ ÙÙÙۧ ÙÙ Ű§ÙÙÙۧÙŰ© ŰŰŻŰ© ۧÙ۱Ù۶ ÙÙÙÙÙ ÙŰ© ۧÙŰŁŰŹÙŰšÙŰ© ÙÙۧۯŰȘ Ű۱ۚۧ ŰŽŰčŰšÙŰ© ۱ÙÙÙŰ©. ÙÙÙŰ Ù ÙÙ ŰÙÙÙŰ© ۧÙŰŁÙ Ű±Ű ÙŰŹŰŻ ŰŁÙ Ű§ÙÙ ŰŽŰ§Ű±ÙŰč ۧÙŰȘÙ Ű±ŰłÙ ŰȘÙۧ ÙÙ Ű§ ŰšŰčŰŻ ۧÙۧ۳ŰȘÙÙŰ§Ù ÙŰŻ ۧÙŰ۔۱ŰȘ ÙŰčÙÙۧ ÙÙ Ű§ÙŰȘŰ۱۱ ۧÙÙŰ·ÙÙ Ù Ù ŰźÙŰ§Ù Ű§ÙŰčÙŰŻŰ© Ű„ÙÙ Ű§ÙŰŁŰ”ÙÙ Ű§ÙŰ«ÙۧÙÙŰ© ۰ۧŰȘ ۧÙÙ Ű±ŰŹŰčÙŰ© ۧÙŰȘÙÙÙŰŻÙŰ©Ű Ù ŰšŰ§ŰčŰȘÙ Ű§ŰŻ ۧÙŰȘŰ”ÙÙŰčŰ Ù ŰšŰ§Ùۧ۳ŰȘŰ«Ù Ű§Ű± Ù ŰšŰ”ÙŰ© ÙŰšÙ۱ۧ ÙÙ Ű§ÙŰȘŰŰŻÙŰ« ۧÙŰȘÙÙÙÙ ŰšŰčÙŰŻ ÙÙ Ű§ÙŰšŰčŰŻ ŰčÙ Ű§ÙŰۯۧ۫۩ ۧÙŰȘÙ ŰȘÙŰȘŰ¶Ù ŰȘŰșÙÙ۱ۧŰȘ Ű«ÙۧÙÙŰ© ŰčÙ ÙÙŰ©Ű Ù ÙÙ Ù Ù Ű§ÙŰŁÙ Ù۱ ۧÙŰȘÙ ÙÙ ÙÙŰȘÙ ŰšÙۧ. Ù ÙŰŻ ŰȘÙ Ù Űč ۰ÙÙ Ű§ÙÙÙŰ§Ù ŰšŰȘŰۧÙÙÙ ÙۧÙŰ„Űčۯۧۯ ÙÙ ŰŽŰ§Ű±ÙŰč ۰ۧŰȘ ۷ۧۚŰč Ű«Ù۱ÙŰ Ù ÙÙÙ ÙÙ ÙŰÙÙ ÙÙۧ ŰŁÙ ŰȘŰčŰ±Ù ŰłÙÙ Ű§ÙÙŰ§Ù ŰŽÙŰ© Ù Ű§ÙŰ„Űčۯۧۯ ÙÙ ŰŻÙۧۊ۱ Ù ŰșÙÙŰ©. Ù ÙÙ۰ۧ ÙÙ ŰȘŰȘÙ ÙÙ "Ű«Ù۱۩" ŰŹŰšÙŰ© ۧÙŰȘŰ۱Ù۱ ۧÙÙŰ·ÙÙ Ù Ù Ű§ÙۧۚŰȘŰčۧۯ ŰčÙ ŰŁÙÙ Ű§Ű· ۧÙŰȘÙÙÙ۱ ۧÙŰȘÙÙÙŰŻÙ Ű§ÙÙ Ù ÙŰČ ÙÙŰȘÙŰȘÙۧŰȘ ۧÙŰŹÙ Ű§ŰčۧŰȘÙŰ©. Ù ÙŰŻ ۱ÙŰčŰȘ ÙŰŽŰčۧ۱ Ù Ù ÙŰšÙ Ű§ÙŰłÙŰ·Ű© ÙÙÙ ŰȘŰłŰȘŰșÙ ÙÙ Ű§Ù۟۷ۧۚ ۧÙŰłÙŰ§ŰłÙ Ű¶Ù Ù Ű§ÙŰȘÙŰŹÙ Ű§ÙŰčŰłÙŰ±Ù Ű§ÙŰ°Ù Ű§ÙŰȘ۔۱ ÙÙ ÙÙۧÙŰ© ۧÙÙ Ű·Ű§Ù ŰšÙÙۧۯ۩ ÙÙŰŠŰ© ۧÙۣ۱ÙŰ§Ù Ű§ÙŰčŰ§Ù Ű© ۧÙŰȘÙ ŰŁŰŽŰ±Ù ŰčÙÙÙۧ ۧÙÙÙÙÙÙÙÙ ŰšÙÙ ŰŻÙÙ ÙÙ Ù ŰłŰ§ŰčÙÙ ÙÙŰłÙ۷۱۩ ŰčÙÙ Ű§ÙŰÙÙ . ÙÙ Ű§ÙŰźÙŰ§Ű”Ű©Ű ÙÙ ŰȘÙÙ ŰŹŰšÙŰ© ۧÙŰȘŰ۱Ù۱ ۧÙÙŰ·ÙÙ Ű«Ù۱ÙŰ© ۚۧÙÙ ŰčÙÙ Ű§ÙŰ”ŰÙŰŰ Ű„Ű°Ű§ ŰȘۏۧÙŰČ Ű§ÙÙÙÙ Ű§Ùۚ۳ÙŰ· ÙÙŰ«Ù۱۩ ۧÙÙ Ű¶Ű§ŰŻŰ© ÙÙۧ۳ŰȘŰčÙ Ű§Ű±Ű Ù Ű„Ű°Ű§ ۣ۟۰Ùۧ ŰšŰčÙÙ Ű§ÙۧŰčŰȘۚۧ۱ ۧÙŰŻÙۧÙۧŰȘ ۧÙÙ ŰźŰȘÙÙŰ© ۧÙŰȘÙ ŰȘۣ۟۰Ùۧ ÙŰ°Ù Ű§ÙÙÙÙ Ű© ŰŁÙ Ű«Ù۱۩ ÙÙ Ű§ÙÙŰșŰ© ۧÙŰč۱ۚÙŰ© ŰŁÙ ÙÙ Ű§ÙÙŰșŰ© ۧÙÙ۱ÙŰłÙŰ©. Ù ÙÙ۰ۧ ÙÙ ÙÙ Ű§ÙÙÙÙ ŰŁÙ ŰŹŰšÙŰ© ۧÙŰȘŰ۱Ù۱ ۧÙÙŰ·ÙÙ ÙÙ ŰȘÙÙ ŰŹŰšÙŰ© Ű«Ù۱ÙŰ©Ű ŰšÙۯ۱ Ù Ű§ ÙۧÙŰȘ ŰŹŰšÙŰ© de page EntrĂ©es dâindex Haut de page Notes de la rĂ©daction Sur ce sujet, cf. lâintelligente analyse de textes de Slimane Chikh, lâAlgĂ©rie en armes ou le temps des certitudes, Economica, Paris, 1981, pp. 345-383. Texte intĂ©gral 1Le Front de libĂ©ration nationale FLN fit une rĂ©volution, qui lui fut consubstantielle de 1954 Ă 1962, puis aprĂšs lâindĂ©pendance. Câest lĂ du moins la vision que propose, coram publico, lâhistoire officielle de lâAlgĂ©rie indĂ©pendante. Dans les manuels dâhistoire pour Ă©coliers du secondaire conçus Ă lâĂ©poque du rĂ©gime autoritaire de Boumediene, et dans ceux des annĂ©es 1980 qui restent encore en usage aujourdâhui, câest lĂ une antienne la guerre de libĂ©ration anticoloniale de lâAlgĂ©rie de 1954-1962 est uniment dĂ©nommĂ©e rĂ©volution », avec, dans les textes en français, une majuscule Ă r » ; le 1er novembre 1954 constitue lâaurore de la RĂ©volution ». Certes, en arabe, le mot thawra, que lâon traduit gĂ©nĂ©ralement â et hĂątivement â par rĂ©volution » peut en effet accepter cette acception, si ce nâest que le champ sĂ©mantique de thawra » est assez diffĂ©rent de celui de rĂ©volution. » 2Il nâimporte thawra », dans les publications officielles en arabe, rĂ©volution » dans celles en français, sont, dans le discours du FLN, le dĂ©but et la fin de toutes choses. Et cela de maniĂšre si insistante que rĂ©volution » finit par vouloir dire beaucoup de choses diffĂ©rentes Ă©ventuellement, la transformation socio-Ă©conomique radicale ; beaucoup plus frĂ©quemment, la guerre de libĂ©ration, en quasi synonyme de jihad ; voire, les inspirations du pouvoir dâĂtat algĂ©rien dans les manuels dâhistoire susmentionnĂ©s, toute dĂ©cision prise par ce dernier est couramment dĂ©nommĂ©e dĂ©cision de la rĂ©volution ». GĂ©nĂ©ralement, tout ce qui est censĂ© aller dans le sens algĂ©rien de lâhistoire y est dĂ©nommĂ© rĂ©volution. » Ainsi, ce fut la rĂ©volution » qui rĂ©solut dâarabiser lâenseignement et de procĂ©der Ă lâalgĂ©rianisation de toutes choses ». Il nâest Ă©videmment pas question ici de remettre en cause â bien au contraire â le bien-fondĂ© de dĂ©cisions qui firent renouer le peuple algĂ©rien avec sa langue majoritaire, laquelle avait Ă©tĂ© sa langue de culture pendant plus dâun millĂ©naire. Cela dit, lâarabisation fut gĂ©nĂ©ralement conçue dans une pente de lĂ©gitimation sous les auspices dâun sacrĂ© qui ne distinguait pas islamitĂ© et arabitĂ©, et qui ne fut guĂšre en soi rĂ©volutionnaire câĂ©tait lĂ lâacception du socialisme spĂ©cifique ». 3Lâhistorien est donc en droit de sâinterroger sur ce que fut cette rĂ©volution » que le FLN de guerre et, aprĂšs lui, ses successeurs au pouvoir prĂ©tendirent rĂ©aliser. Ă tout le moins, il ne peut sâempĂȘcher dâĂȘtre pris par le doute il est frĂ©quent, en histoire, que la scansion obsessionnelle dâun objet camoufle la vacuitĂ© voire lâinexistence dudit objet. Refus de lâoppression Ă©trangĂšre et guerre populaire rurale 1 MujĂąhid le combattant en armes du jihĂąd guerre sacrĂ©e contre lâennemi religieux ; mussabil le ... 2 Cotisation patriotique. 4La rĂ©volution, en AlgĂ©rie, se dĂ©duit a priori de la forme de lutte on est bien en prĂ©sence dâun mouvement armĂ© populaire. Guerre populaire organisĂ©e, elle ne se rĂ©duit en aucun cas Ă la sĂ©rie dâactes terroristes individuels Ă laquelle les rĂ©ticences communistes Ă lâendroit du FLN voulurent au dĂ©part la rĂ©duire. Dans la guerre populaire, il y a un aspect de dĂ©foulement collectif contre tout ce dont le peuple rend responsable son malheur luttant pour lâindĂ©pendance, les mujĂąhidĂ»n et les musabbilĂ»n1 rĂšglent en mĂȘme temps des comptes avec la loi coloniale ; ils vengent les AlgĂ©riens du rĂ©gime de la commune mixte ; ils en dĂ©cousent avec lâordre caĂŻdal ancien ; ils sâattaquent aux colons pendant que la masse de leurs compatriotes, expressĂ©ment, applaudissent aux exactions contre les collaborateurs et Ă la soumission des grands propriĂ©taires Ă lâichtirĂąk2. Incontestablement, tout AlgĂ©rien se voit Ă un moment ou Ă un autre en rĂ©sistant, en Ă©mule activiste de la figure de Jeha, le hĂ©ros populaire qui fait la nique aux puissants et leur joue des tours. 5La plate-forme de la Soummam, lâhistorique congrĂšs de lâĂ©tĂ© 1956, campe, sur un mode populiste habituel dans les luttes de libĂ©ration du tiers-monde, une sociĂ©tĂ© dans laquelle un peuple pauvre lutte pour son Ă©mancipation. Ce peuple est dirigĂ© par des dirigeants lucides et sincĂšres, pleins dâabnĂ©gation, tel que, par exemple, Abbane, le promoteur du congrĂšs, se voyait â Ă juste titre â, ou tel quâun Ben Tobbal le fut pendant sa pĂ©riode de colonel de maquis Ă la tĂȘte du Constantinois. Ces dirigeants se prĂ©sentent comme nâĂ©tant rien sans un peuple auquel ils adhĂšrent par la communautĂ© de lutte depuis lâĂ©vĂ©nement fondateur lĂ©gitimisant de novembre 1954. 3 Mohammed Harbi, le FLN, mirage et rĂ©alitĂ©, Jeune Afrique, Paris, 1980, pp. 178-179. 4 Union gĂ©nĂ©rale des syndicats algĂ©riens, liĂ©e Ă la CGT française. 5 Union gĂ©nĂ©rale des travailleurs algĂ©riens. 6 Le MTLD Mouvement pour le triomphe des libertĂ©s dĂ©mocratiques Ă©tait la couverture lĂ©gale, notamme ... 6Est bien garante de la rĂ©volution » dans les textes du FLN lâindĂ©fectible paysannerie, masse de manĆuvre essentielle de lâArmĂ©e de libĂ©ration nationale, lâALN. Si, dans la plate-forme de la Soummam, elle est bien considĂ©rĂ©e comme telle, si une rĂ©forme agraire » lui y est hĂątivement promise, elle y est toutefois dite quelque peu retardataire » au regard des citĂ©s3. La classe ouvriĂšre » y est dĂ©crĂ©tĂ©e insuffisamment militante. Ă la diffĂ©rence de lâUGSA-CGT4, prĂ©sentĂ©e comme embourgeoisĂ©e, lâUGTA5, la centrale ouvriĂšre du FLN, est prĂ©sentĂ©e comme le syndicat des catĂ©gories les plus exploitĂ©es. Cette affirmation Ă©manait bien dâune fausse conscience populiste donnant le coup de pied de lâĂąne au Parti communiste les adhĂ©rents algĂ©riens de lâUGTA recrutaient sensiblement sur le mĂȘme terreau social â cheminots, fonction publique â que lâUGSA. Les rĂ©dacteurs de la Soummam â qui comprennent des citadins des classes moyennes provenant du MTLD6 â assignent cependant bien un rĂŽle politique pionnier et premier aux Ă©lĂ©ments citadins politiquement mĂ»rs. » Mais la conception du congrĂšs de la Soummam fut le fait dâidĂ©ologues Ă©voluĂ©s » ne rĂ©pondant pas vraiment aux vues des dirigeants maquisards de terrain majoritairement ruraux ; ce pour quoi ils prirent vite leurs distances avec ses rĂ©solutions. Et lâaile marchante du FLN et de lâALN se situait bien dans les campagnes. 7 Ce programme a Ă©tĂ© prĂ©parĂ© pendant la gestation du deuxiĂšme congrĂšs du CNRA Ă sâĂȘtre effectivement ... 8 WilĂąya circonscription militaire suprĂȘme de lâArmĂ©e de libĂ©ration nationale des maquis. 7Câest pourquoi, Ă la suite de lâĆuvre de lâidĂ©ologue Frantz Fanon, la paysannerie fut de plus en plus parĂ©e de vertus rĂ©volutionnaires primordiales, tout simplement parce quâelle nâĂ©tait, chez Fanon et chez ses disciples algĂ©riens, pas autre chose que lâimage mĂ©tonymique du tiers-monde luttant pour sa libĂ©ration. Le projet de programme conçu dans le second semestre de 1959 Ă©tait redevable notamment Ă Fanon7. Il faisait de la libĂ©ration nationale un tout indissociable de la rĂ©volution sociale, dont la force dirigeante Ă©tait la paysannerie. Ce faisant, il ne tenait pas compte du bouleversement et de lâirrĂ©versible perte de substance de la paysannerie pendant la guerre Ă coups de zones interdites et de camps de regroupement. Les ouvriers, eux, Ă©taient dits dans les villes ĂȘtre lâĂ©lĂ©ment le plus dynamique. » Ătait recommandĂ©e lâinstitution, Ă chaque Ă©chelon de lâALN, dâun comitĂ© UGTA. Lâexistence de tels comitĂ©s est attestĂ©e en wilaya III8 Kabylie, surtout, et en wiliaya IV AlgĂ©rois. 8Guerre populaire, la guerre de libĂ©ration impulsĂ©e par le FLN et lâALN est bien une rĂ©volution car elle est renversement de lâordre Ă©tabli dans la sociĂ©tĂ©. Dans la mesure oĂč lâordre Ă©tabli Ă©tait vu comme prioritairement colonial, le FLN, câĂ©tait la rĂ©volution puisque câĂ©tait bien lâordre colonial quâil condamnait et se proposait dâabattre. Mais, une rĂ©volution câest dâabord un retour sur soi, un renversement de sa propre sociĂ©tĂ©, un programme se proposant de faire table rase de son passĂ©. Et le passĂ© de lâAlgĂ©rie nâĂ©tait pas, tant sâen faut, seulement colonial. 9Or, rien nâindique quâune guerre populaire soit, de ce point de vue, forcĂ©ment une rĂ©volution. Les camisards insurgĂ©s au dĂ©but du xviiie siĂšcle, en France, dans les CĂ©vennes protestantes, ne dĂ©siraient pas changer leur sociĂ©tĂ©, peut-ĂȘtre mĂȘme au contraire. Luttant contre les dragonnades du roi de France, ils luttaient contre le pouvoir royal central, voire contre tels de leurs pasteurs qui se mĂ©fiaient de la propension des insurgĂ©s Ă prophĂ©tiser. Ils dĂ©fendaient leur morale, leurs conceptions messianistes, leur sociĂ©tĂ© montagnarde cĂ©venole. Guerre populaire, la guerre des camisards ne fut jamais une rĂ©volution. Ă lâinverse, il y a des rĂ©volutions sans guerre populaire. Et il y a dâautres rĂ©volutions que les rĂ©volutions politiques et sociales. Passe pour la rĂ©volution perspectiviste qui, dans la peinture italienne, au quattrocento, bouleverse les modes de reprĂ©sentation de lâespace et du monde, ou encore, dans la musique europĂ©enne, la rĂ©volution atonale du dĂ©but du xxe siĂšcle. Mais, en tant que rĂ©volution politique et sociale, la RĂ©volution française a triomphĂ© grĂące Ă la guerre nationale impulsĂ©e de Paris par la Convention, et non par une guerre populaire. La guerre populaire se rĂ©duisit aux mouvements de la Grande Peur, aux massacres de septembre 1792, ou aux maquis de la guerre de VendĂ©e. Mais, dans ce dernier cas, la guerre, si elle fut bien populaire, fut contre-rĂ©volutionnaire. 10Dans les textes du FLN, lâobjectif Ă atteindre est la libĂ©ration de la domination coloniale de la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne, unanimement mobilisĂ©e Ă cette fin. Le programme, si lâon peut parler de programme Ă propos de textes Ă©pars dont quelques-uns seulement ont une cohĂ©rence dĂ©monstrative, est un contre-programme » dont les chapitres sont autant dâarticles portant destruction du systĂšme colonial. La plate-forme de la Soummam mettait sur pied un Ătat et non un changement social. Sous une teinture marxisante redevable Ă la personnalitĂ© de lâun de ses principaux rĂ©dacteurs, lâex-dirigeant communiste Ouzegane, et destinĂ©e durablement Ă recouvrir des marchandises diverses, elle ne mentionnait la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne que sur le mode fonctionnel de diffĂ©rentes couches dites la composer » il nây avait ni exploiteurs ni exploitĂ©s, il y avait des paysans, des travailleurs, des intellectuelsâŠ, sans parler des jeunes et des femmes ; la moitiĂ© de la population Ă©tait mise sur le mĂȘme plan que diverses catĂ©gories socioprofessionnelles. Le peuple Ă©tait dĂ©clarĂ© uni dans le combat libĂ©rateur. Mais, pour lâaprĂšs, câĂ©tait le grand silence. Ămancipation nationale etmodernisme technophile 11De 1954 Ă 1962, lâĂ©mancipation du joug Ă©tranger est la clĂ© de toutes choses, notamment du dĂ©veloppement Ă©conomique. Le dĂ©veloppement Ă©tant toujours connotĂ© positivement, le colonialisme est toujours analysĂ© comme la seule cause du sous-dĂ©veloppement et son quasi synonyme. Le plan de Constantine est dĂ©noncĂ© par le journal du FLN El Moudjahid comme un guet-apens nĂ©ocolonialiste destinĂ© Ă accoucher dâune troisiĂšme force sociale et politique susceptible de constituer lâ interlocuteur valable idĂ©al ». Les textes du FLN sur le programme Ă©conomique et social Ă rĂ©aliser restent dans le vague. Mais ils vont tout de mĂȘme au-delĂ de la quasi-vacuitĂ© du MTLD en la matiĂšre avant 1954. Si le texte du congrĂšs de la Soummam est Ă peu prĂšs muet sur le sujet, El Moudjahid salue Ă plusieurs reprises lâavĂšnement futur de la justice sociale, toujours conditionnĂ©e par le dĂ©veloppement Ă©conomique. 9 N° 88, cit. in Slimane Chikh, op. cit., p. 347. 12Sur ce quâil convient de faire une fois lâindĂ©pendance acquise, la plupart des textes officiels du FLN sont prudents. Tels articles du Moudjahid peuvent occasionnellement lâĂȘtre moins ; mais le Moudjahid fut, sur le sujet, censurĂ© dans la version officielle dĂ©finitive reliĂ©e que lâAlgĂ©rie fit Ă©diter en Yougoslavie aprĂšs lâindĂ©pendance. Ă vrai dire, un seul texte Les exigences de notre dĂ©veloppement Ă©conomique »9 donne quelques orientations. Celles-ci restent surtout des pĂ©titions de principe en faveur de la dĂ©mocratie sociale » et dâun dĂ©veloppement Ă©conomique » qui ne sera pas technocratique mais dĂ©mocratique. » Câest Ă©videmment la loi du genre peu de programmes ont jamais revendiquĂ© un dĂ©veloppement technocratique et antidĂ©mocratique. La dĂ©mocratie nâempĂȘchera pas le dĂ©veloppement dâĂȘtre lâĆuvre de lâĂtat pour permettre de brĂ»ler efficacement les Ă©tapes du dĂ©veloppement. Et, sur le fond, le FLN eut au moins une ressemblance avec le marxisme-lĂ©ninisme, quâil eut pourtant en sainte horreur il fut pour lâessentiel une idĂ©ologie de la rupture et de la mobilisation qui, sensiblement comme le marxisme-lĂ©ninisme, Ă©choua finalement Ă construire. 10 Anouar Abdel Malek, la PensĂ©e politique arabe contemporaine, Seuil, coll. P, Paris, 1969 introduct ... 11 La CitĂ©, Lausanne, 1961, 300 p. 13UltĂ©rieurement, Ă lâĂšre Boumediene, dans lâoption dite socialiste, lâ industrie industrialisante », prĂ©sentĂ©e comme panacĂ©e par le groupe dâexperts issus de lâ Ă©cole de Grenoble », devint quasiment synonyme de rĂ©volution. Le lĂ©ninisme avait eu les soviets plus lâĂ©lectricitĂ© ». On peut dire que la rĂ©volution » boumĂ©diĂ©niste eut surtout comme arguments QiyamunĂą wal naft » Nos valeurs et le brut ». Mais, dĂšs avant lâindĂ©pendance, ce type de discours rĂ©volutionnariste Ă©tait en voie de constitution chez une bureaucratie dirigeante en proie aux prurits du modernisme » â câest-Ă -dire de la rĂ©tention instrumentale des Ă©piphĂ©nomĂšnes techniques des sociĂ©tĂ©s industrielles â et beaucoup moins de la modernitĂ© » â terme renvoyant Ă des changements culturels en profondeur â, pour reprendre la lumineuse distinction proposĂ©e par Anouar Abdel Malek10. Ă vrai dire, ce modernisme constituait dĂ©jĂ lâordinaire culturel de nombre de technocrates du FLN, Ă commencer par BelaĂŻd Abdesselam et Laroussi Khelifa, qui furent tous deux professeurs, en 1957-1958, Ă lâĂ©cole des cadres du FLN dâOujda, et bientĂŽt tous deux ministres dans lâĂtat indĂ©pendant. On sait que BelaĂŻd Abdesselam fut le ministre technocrate-clĂ© de lâĂ©poque Boumediene. Le texte des cours dispensĂ©s Ă lâĂ©cole dâOujda, signĂ© Laroussi Khelifa, fut Ă©ditĂ© en Suisse en 1961 sous le titre de Manuel du militant algĂ©rien11. 12 Albert Memmi, Portrait du colonisĂ©, prĂ©cĂ©dĂ© de Portrait du colonisateur, CorrĂ©a, Paris, 1957. 14Câest dans le registre du modernisme que se situent les douze pages sur trois cents qui traitent des perspectives dâavenir de lâĂ©conomie algĂ©rienne. » La rĂ©forme agraire » est expĂ©diĂ©e rapidement et elle renvoie surtout au retour de la terre algĂ©rienne Ă ses lĂ©gitimes propriĂ©taires », malgrĂ© lâallusion, au travers dâune ligne, aux mĂ©thodes chinoises » et Ă leurs succĂšs Ă©clatants », et malgrĂ© une autre ligne consacrĂ©e aux coopĂ©ratives de production ». La place bien plus importante qui est laissĂ©e Ă lâindustrie traduit le dĂ©sintĂ©rĂȘt, pour ne pas dire le mĂ©pris, pour la paysannerie. On dira, en suivant Albert Memmi12, quâil porte la marque dâun mĂ©pris intĂ©riorisĂ© de facture schizophrĂ©nique coloniale. 13 ThĂ©ologien damascĂšne du XIIIe siĂšcle ayant suivi la doctrine littĂ©raliste dâIbn Hanbal ; conservate ... 15Les choses sĂ©rieuses, câest lâĂ©mancipation rĂ©volutionnaire sur le plan industriel », qui annonce en avant-premiĂšre lâindustrie industrialisante Lâindustrie lourde, base de lâindĂ©pendance » et les possibilitĂ©s dans le domaine de lâindustrie lĂ©gĂšre » doivent dĂ©boucher sur la multiplication rapide du niveau de vie du citoyen algĂ©rien ». Dans ce livre, pas un chapitre sur la culture juste une page consacrĂ©e Ă lâobscurantisme, rĂ©fĂ©rĂ© seulement aux mĂ©faits du colonialisme et en aucun cas Ă la descendance de Ibn Taymiyya13; et deux pages sur la doctrine rĂ©volutionnaire, oĂč il est exclusivement question de la libĂ©ration du monde colonisĂ© â un coup de chapeau Ă lâappui Ă la vaillante petite Irlande », vaillante et ancrĂ©e dans sa foi, lâIrlande, rĂ©fĂ©rence obligĂ©e de tout lâindĂ©pendantisme algĂ©rien depuis lâĂtoile nord-africaine lâENA. 16Le Manuel du militant algĂ©rien, ainsi que le prĂ©sente son auteur, est un recueil de connaissances Ă la fois historiques sur la Patrie et de connaissances gĂ©nĂ©rales utiles Ă tous cadres et militants de la RĂ©volution ». On trouvera, de fait, plus dans cet ouvrage un recueil pour servir Ă la culture gĂ©nĂ©rale pratique dâĂ©lĂšves promis Ă ĂȘtre cadres quâun manifeste rĂ©volutionnaire pĂ©dagogique pour militants. Lâessentiel du livre est constituĂ©, en effet, dâun cours dâhistoire anticoloniale, de gĂ©ographie Ă©conomique et de gĂ©nĂ©ralitĂ©s de sciences politiques, mais sans idĂ©es politiques bien discernables, Ă lâexception dâune seule la lĂ©gitimitĂ© de la RĂ©volution », câest-Ă -dire de la rĂ©volution anticoloniale. 17De fait, dans la plupart des textes du FLN, lâindĂ©pendance doit pourvoir Ă tout. Câest que, en AlgĂ©rie, les humains avaient des urgences partagĂ©es par la plupart des AlgĂ©riens la libĂ©ration de la domination Ă©trangĂšre. Et les urgences ne sont guĂšre propices aux rĂ©flexions et aux maturations. Câest lĂ la grande diffĂ©rence avec, par exemple, un ViĂȘt-nam oĂč la grande propriĂ©tĂ© Ă©tait vietnamienne alors quâen AlgĂ©rie elle Ă©tait principalement française. Au ViĂȘt-nam, pays de guerres paysannes sĂ©culaires, les combats Ă©taient autant vietnamo-vietnamiens quâils Ă©taient vietnamo-français. Le nationalisme y fut donc consubstantiel du communisme. 18DiffĂ©rence, mĂȘme, avec la situation française de 1940-1945 il nây eut jamais en AlgĂ©rie de force politique consistante collaborant avec lâennemi de maniĂšre consciente et par choix idĂ©ologique dĂ©libĂ©rĂ© comme le rĂ©gime de Vichy ; les harkis ne furent guĂšre des collaborateurs au sens français, ils ne furent guĂšre que des mercenaires. Donc, il nây eut jamais de volontĂ© de retour sur soi voulant Ă©liminer une idĂ©ologie collaborationniste â pratiquement inexistante dans le champ historique algĂ©rien. Ă lâinverse, en France, lâidĂ©ologie collaborationniste Ă©tait reliĂ©e Ă une tradition dâextrĂȘme-droite et Ă des combats franco-français au regard desquels il nây eut jamais consciemment de comparables combats algĂ©ro-algĂ©riens. Le consistant programme du CNR français Ă©tait donc, au sortir de la guerre, principalement un retour sur soi. Rien de comparable dans le programme du FLN. Analyses et projets Ă la marge 14 FĂ©dĂ©ration nationale de lâĂ©lectricitĂ© et du gaz dâAlgĂ©rie, cf. Mohammed Boussoumah, lâEntreprise so ... 15 ElectricitĂ© et Gaz dâAlgĂ©rie. 16 Conseil national de la RĂ©volution algĂ©rienne, le parlement du FLN, instituĂ© au congrĂšs de la Soumma ... 19Cependant, marginalement et quasiment Ă huis clos, lâavenir de lâAlgĂ©rie fut objet de dĂ©bat, Il y eut notamment dans le mouvement syndical quelques authentiques projets constructifs. Au sein de lâUGTA, de la FNEGA14, qui avait une certaine notoriĂ©tĂ© dans le monde du travail, fut lancĂ© le mot dâordre dâautogestion la FNEGA Ă©labora un rapport sur la mutation du conseil dâadministration de lâEGA15 en comitĂ© de gestion selon des principes qui allaient dans le sens du socialisme coopĂ©ratif. Mais, Ă notre connaissance, il ne fut jamais fait grand cas de ce rapport dans les milieux dirigeants du FLN, et lâon ne parla guĂšre dâautogestion, ni au GPRA ni dans les cinq sessions successives du CNRA16. Ce fut notamment Ă partir de ce rapport que, ultĂ©rieurement, le dĂ©putĂ© AĂŻt Ahmed fit le 8 dĂ©cembre 1962 une proposition de loi sur lâautogestion ouvriĂšre. Et, trois mois plus tard, le rĂ©gime Ben Bella entĂ©rina formellement lâautogestion par les dĂ©crets de mars. Mais ce fut dans un contexte oĂč, au lendemain du premier congrĂšs de lâUGTA en janvier 1963, le mouvement syndical avait Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©ment domestiquĂ© par le pouvoir dâĂtat. LâavĂšnement formel de lâautogestion en AlgĂ©rie se fit donc sur les fonts baptismaux de la bureaucratisation. 17 Sur lâUGTA, Cf. François Weiss, Doctrines et action syndicale en AlgĂ©rie, Cujas, Paris, 1970 ; Moha ... 18 Union gĂ©nĂ©rale des Ă©tudiants musulmans algĂ©riens. 19 Cf. Slimane Chikh, op. cit., p. 351. 20Lors de la rĂ©daction du projet de programme du FLN de 1959, il y eut aussi dĂ©bat Ă la centrale ouvriĂšre UGTA17 â dont nombre de membres, au moins dans la prime gĂ©nĂ©ration, venaient de la CGT. Il y en eut aussi Ă la centrale Ă©tudiante UGEMA18 et Ă la section universitaire du FLN, qui succĂ©da quelque temps Ă lâUGEMA. AprĂšs son interdiction par le gouvernement français en 1958. En 1962, lâUGEMA rĂ©dige un fort volume dactylographiĂ© sur lâĂ©conomie algĂ©rienne19, qui prĂ©cise et complĂšte le Manuel du militant algĂ©rien ; mais en gardant la mĂȘme inspiration oĂč le technique prĂ©domine et oĂč le politique est second. LĂ aussi, la petite propriĂ©tĂ© doit coexister avec des coopĂ©ratives, et lâexemple chinois nâest convoquĂ© que comme modĂšle de mobilisation des masses. » 20 Mohammed Harbi, le mirage et rĂ©lalitĂ©, p. 252. 21 Ibid., p. 253 21Les alliances Ă rechercher par le FLN sont conçues dans le projet de programme de 1959 par deux groupes diffĂ©rents de responsables lâun attirĂ© par lâOccident, lâautre par le bloc socialiste. Elles doivent ĂȘtre conçues, non dans le cadre dâune hostilitĂ© Ă lâOccident, mais au colonialisme il faut rassurer nos partenaires quant Ă nos perspectives Ă©conomiques aprĂšs lâindĂ©pendance »20, et, Ă la fois, elles doivent sâouvrir sur les pays socialistes qui ont dĂ©montrĂ© leur capacitĂ© Ă aider matĂ©riellement et financiĂšrement lâAlgĂ©rie en lutte. Conjoncturellement, et loin de tout choix idĂ©ologique, il sâagit de jouer lâun contre lâautre le bloc occidental et le bloc socialiste Lâanti-impĂ©rialisme nâest quâun facteur de mobilisation de lâopinion nationale et internationale contre le colonialisme français. On se leurre donc Ă vouloir rendre compte de la nature du FLN en fonction de ses alliances diplomatiques »21. 22 LâEMG fut créé en janvier 1960 et confiĂ© au colonel Boumediene. Ce segment militaire, appuyĂ© Ă la p ... 22De toute façon, des textes de ce type sont peu nombreux et, non diffusĂ©s, ils restent Ă usage restreint pour quelques cadres et responsables. Le projet de programme resta Ă lâĂ©tat de projet, mĂȘme sâil fut ultĂ©rieurement utilisĂ© dans certains de ses aspects pour donner une teinture rĂ©volutionnaire Ă la rhĂ©torique de lâĂtat-major gĂ©nĂ©ral EMG22. 23Un texte cĂ©lĂšbre â la Charte de Tripoli â, prĂ©sentĂ©e fin mai 1962 Ă la derniĂšre session du CNRA, cĂ©lĂ©bra sur le mode populiste engagĂ© les vertus rĂ©volutionnaires innĂ©es de la base populaire. Plus intĂ©ressant, il fit Ă contre-courant, et non sans courageuse luciditĂ©, le procĂšs des insuffisances rĂ©volutionnaires du FLN. Le texte, qui porte la marque dâun cĂ©nacle dâintellectuels de gauche marginalisĂ©s, et qui fut rĂ©digĂ© en petit comitĂ©, stigmatise le clanisme, le clientĂ©lisme, lâesprit fĂ©odal » et lâesprit petit-bourgeois » dâune bureaucratie coupĂ©e des masses et dĂ©politisĂ©e. Il souligne la bureaucratisation du FLN et la mainmise sur lui de lâarmĂ©e. Ă lire ce texte â volĂ©e de bois vert que nombre de participants au CNRA auraient pu adopter comme acte de contrition â, il est peu aisĂ© de comprendre pourquoi il fut votĂ© Ă lâunanimitĂ© par le mĂȘme CNRA, sauf Ă conclure Ă un cas collectif de masochisme. Certes, ce texte ne fut lu pratiquement que par peu de participants. Et il est Ă parier que nâimporte quel autre texte aurait de mĂȘme pu ĂȘtre adoptĂ©. De toute façon, personne nâentendait en suivre les inspirations et les recommandations. Fut gardĂ© cependant un populisme spontanĂ© de lĂ©gitimation qui allait, pour plusieurs lustres, constituer une base du discours officiel de pouvoir algĂ©rien. 24Câest toutefois le programme de Tripoli qui reste le texte le plus consistant et la dĂ©claration dâintentions la plus construite en matiĂšre dâaspirations rĂ©volutionnaires. Ces aspirations Ă©taient sous-tendues par des analyses, certes dĂ©veloppementalistes, ici et lĂ marxisantes, et qui insistaient plus sur la paysannerie et lâagriculture que le Manuel du militant algĂ©rien. Surtout, lâoriginalitĂ© du texte rĂ©side en cela quâil nâignorait pas la question culturelle. Certes, il se rĂ©fĂ©rait Ă lâislam incontournable, mais Ă un islam purifiĂ©, vu comme insĂ©parable dâune culture nationale. 25La culture, dans une langue de bois nationale-marxisante, il la voulait nationale, rĂ©volutionnaire et scientifique ». Ăvidemment, la langue arabe devait y redevenir langue nationale, mais sans quây fĂ»t jamais entreprise lâanalyse du topos algĂ©rien unissant intimement langue arabe et sacrĂ©. Le caractĂšre scientifique de la culture devait assez naĂŻvement suffire Ă promouvoir une sĂ©cularisation que, entre les lignes, les rĂ©dacteurs semblaient appeler de leurs vĆux. Pour lâheure, Ă©taient rejetĂ©s sans mĂ©nagement le cosmopolitisme culturel et lâimprĂ©gnation occidentale qui ont contribuĂ© Ă inculquer Ă beaucoup dâAlgĂ©riens le mĂ©pris de leur langue et de leurs valeurs nationales ». Bien comprĂ©hensible, vu le contexte, une telle assertion reposait cependant toujours sur la cĂ©sure entre eux » et nous ». 23 Il existe en effet plusieurs procĂ©dĂ©s pour exhĂ©rĂ©der les femmes, notamment par le biais de la const ... 26Ă Tripoli, un autre texte avait Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© par la FĂ©dĂ©ration de France. Il eut incomparablement moins dâaudience et il reste moins connu. Au demeurant, il ne fut mĂȘme pas discutĂ©. Câest quâil allait plus nettement Ă contre-courant en affirmant le principe de la sĂ©paration du culte et de lâĂtat ». Le mĂȘme texte prenait des distances avec la tradition conservatrice du droit musulman il entendait sans ambages supprimer la polygamie, la rĂ©pudiation unilatĂ©rale et le rĂ©gime successoral qui, au mieux, et encore quand le droit musulman Ă©tait appliquĂ©23, ne donnait Ă une fille que la moitiĂ© de lâhĂ©ritage revenant Ă un garçon. De telles avancĂ©es furent uniques et elles ne furent jamais diffusĂ©es. De toute façon, ce texte ne contenait que des propositions qui nâĂ©taient pas vraiment intĂ©grĂ©es dans une problĂ©matique dâensemble ; en effet, le problĂšme des AlgĂ©riens, câĂ©tait câest toujours ? quelle sociĂ©tĂ© politique construire pour quelle sociĂ©tĂ© civile ? Cette thĂ©matique dâensemble nâĂ©tait pas rĂ©ellement abordĂ©e. Inspiration anticapitaliste et prurits libertaires 27Le FLN est dans lâidĂ©ologie unanimiste. Les clivages principaux sont bien entre eux » et nous » ; ils ne se situent pas chez nous. » Les oppositions et les conflits qui surviennent chez nous » sont Ă©vacuĂ©s des dĂ©bats publics. Câest pourquoi il nâest guĂšre de convives qui ne troÂvent place au banquet de grande famille qui figure la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne. 28Seule la bourgeoisie est dĂ©cidĂ©ment rejetĂ©e, mais câest pour ses hĂ©sitations nationales et son opportunisme ; la mĂȘme raison pour laquelle de Gaulle nationalisa Renault, non par engagement anticapitaliste, mais pour punir Renault de son comportement collaborationniste pendant la guerre. Au FLN, de surcroĂźt, comme dans la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne, sâil y a des bourgeois, il nây a guĂšre de vraie bourgeoisie. Mais â sâen Ă©tonnera-t-on ? â, le danger de la bureaucratisation nâest jamais stigmatisĂ© Ăšs qualitĂ©s, Ă lâexception des critiques de la Charte de Tripoli et de quelques rĂ©actions de jeunes officiers dans des wilayas â la IV AlgĂ©rois, la III Kabylie, voire la I AurĂšs-Nememcha â oĂč les dĂ©nonciations empruntent Ă vrai dire surtout la voie du moralisme spontanĂ©. La volontĂ© de rejeter le capitalisme est bien Ă©noncĂ©e mais il ne sâagit pas forcĂ©ment dâun rejet essentiel. Le capitalisme est en effet surtout dĂ©noncĂ© parce quâil est vu comme le systĂšme du colonisateur. Le capitalisme qui est condamnĂ©, câest le capiÂtalisme des autres. Câest du moins ce qui ressort des textes alors que, entre les hommes, comme sur le terrain entre les wilayas, des divergences existaient assurĂ©ment. 24 Jeunes lycĂ©ens du collĂšge de Blida qui se formĂšrent politiquement au moment du dĂ©barquement amĂ©rica ... 25 Ministre de lâinformation du GPRA de 1958 Ă 1962. 29En effet, lâoption anticapitaliste va Ă lâinverse des yeux doux que fit longtemps aux AmĂ©ricains le FLN, dans le prolongement des illusions des jeunes du groupe de Blida de 194324. Mais elle fut sĂ»rement soutenue par tels autres militants un Omar Oussedik, en wilaya IV, par exemple, qui fut proche du Parti communiste algĂ©rien. et fut enthousiasmĂ© parce quâil vit en Chine lors de la visite de la mission militaire algĂ©rienne au printemps 1959, ne pensait pas la mĂȘme chose quâun Mâhamed Yazid25 ou un Belkacem Krim par exemple. Mais des divergences pouvant exister entre les uns et les autres, les masses » nâĂ©tant jamais informĂ©es. 26 Cf. Mohamed Teguia, lâAlgĂ©rie en guerre, OPU, Alger, 27 ArmĂ©e. 30Certes, la tonalitĂ© gĂ©nĂ©rale de la wilaya IV est plus rĂ©volutionnaire que celle de toutes les autres26. Si, politiquement, elle ne fut jamais communiste, il nâest pas contestable quâelle fut, davantage que toutes les autres wilayas, influencĂ©e par lâidĂ©ologie communiste. Mais, en mĂȘme temps, câest dans la IV que la convivialitĂ© prolonge peut-ĂȘtre le mieux la camaraderie politique du MTLD. Câest lĂ que lâALN ressemble le plus Ă une armĂ©e de militants en armes. Câest lĂ que les rapports du jaych27 avec la population sont dans lâensemble les plus confiants. Et, au moins jusquâĂ la disparition au combat du colonel Si Mâhamed 5 mai 1959, les rapports dâautoritĂ© sont moins accusĂ©s quâailleurs ; les grades ne sont pas toujours portĂ©s sur les vĂȘtements, mĂȘme aprĂšs le congrĂšs de la Soummam. DâaprĂšs plusieurs tĂ©moignages, SaĂŻd Mohammedi, ancien agent de lâarmĂ©e allemande en Tunisie pendant la deuxiĂšme guerre mondiale, et qui fut colonel de la wilaya III Kabylie en 1956-1957, sâĂ©tait fait une spĂ©cialitĂ© des garde-Ă -vous martiaux dĂ©monstratifs. Au congrĂšs de la Soummam, il en gratifia dâabondance ses collĂšgues. Tout lâattirail hiĂ©rarchique ostentatoire de galons et de dĂ©corations dont son prĂ©dĂ©cesseur Krim â et aprĂšs lui SaĂŻd Mohammedi et Amirouche â fut si friand en wilaya III sont volontiers tenus dans la IV comme des hochets de pouvoir indignes de lâesprit de cette derniĂšre. Mais on a vu combien la wilaya IV Ă©tait une relative exception. Et Ă ce titre elle pouvait ĂȘtre suspecÂtĂ©e par dâautres wilayas. 28 CĂ©lĂšbre militant kabyle aux soins duquel fut tournĂ© Ă la ronĂ©o, Ă Ighil-Imoula, en Kabylie, le text ... 29 Ali Zamoum, le Pays des Hommes libres. Tamurt Imazighen, La PensĂ©e sauvage, Paris, 1998, p. 269. 31Dans des circonstances exceptionnelles, Ă la prison de Rouen, les dĂ©tenus algĂ©riens mirent en pratique la communautĂ© des biens. De fait, dans le sentiment messianique spontanĂ© du peuple, Ali Zamoum28 rapporte de sa longue expĂ©rience carcĂ©rale Nous avions refusĂ© lâinjustice symbolisĂ©e par le colonialisme, la justice ne pouvait se concevoir sans Ă©galitĂ©. LâĂ©galitĂ© Ă©tait la condition dâune vraie fraternitĂ©. »29 30 Youssef Zighout fut le chef de la wilaya II Constantinois de dĂ©but 1955 Ă sa mort au combat en oc ... 31 in Archives du SHAT Service historique de lâarmĂ©e de terre, 1H1719-1. 32Dans la wilaya II Constantinois, les cahiers dâĂ©coliers sur lesquels son chef, le colonel Zighout30, inscrivait ses notes personnelles insistent bien sur les origines communistes de lâĂtoile nord-africaine et notent quâil faudra confiscation des biens, redistribution, rĂ©formes agraires, crĂ©ation de comitĂ©s de fermage populaire qui veillera Ă lâexploitation des terres et rĂ©partition [sic] »31. 33Mais rien nâindique que ces projets aient servi de support Ă la propagande adressĂ©e par le commandement de la wilaya II aux masses auxquelles il sâadressait, ni du fait du colonel Zighout, ni du fait de ses successeurs Ă la tĂȘte de la wilaya II. En tout cas, le FLN avait aidĂ© Ă ancrer dans les esprits dâun peuple matraquĂ© par le colonialisme cette idĂ©e que le recours normal Ă une situation dâinjustice passe par la rĂ©volte armĂ©e. Câest un rĂ©flexe qui est bien toujours vivace dans lâAlgĂ©rie du dĂ©but du xxie siĂšcle. Mais, en dĂ©phasage apparent avec la sublimation populiste, pour des colonels comme Boussouf wilaya V, Oranie ou Ben Tobbal II, la guerre Ă©tait vraisemblablement vue comme une Ă©cole de dressage apprenant au peuple Ă aspirer Ă des objectifs quâil nâavait pas la capacitĂ© de concevoir sans lâintervention et la domination de lâappareil des serviteurs-guides du peuple. 34Le peuple » â plus rarement les masses » â, dans les textes du FLN, ce sont, plutĂŽt que les ouvriers, les travailleurs » â ainsi dĂ©nommĂ©s de maniĂšre gĂ©nĂ©ralement indiffĂ©renciĂ©e, plus affective et moins marquĂ©e politiquement que ce que signifieraient les ouvriers dâune classe ouvriĂšre ». Ce sont surtout les paysans, lesquels sont bien dans leur Ă©norme majoritĂ© les troupes de lâALN, et qui incarnent bien la continuitĂ© historique de la rĂ©sistance anticoloniale depuis le xixe siĂšcle. 35De fait, la rĂ©volution anticoloniale algĂ©rienne est surtout paysanne, malgrĂ© la tragĂ©die de 1957 Ă Alger la Bataille dâAlger » et le rĂ©veil citadin de la fin 1960, marquĂ© par les grandes manifestations qui se produisirent Ă lâoccasion de la visite de de Gaulle en AlgĂ©rie. Les paysans sont lâobjet dâune foule de commentaires louangeurs, qui les exaltent au prorata de lâimportance qui leur est accordĂ©e dans le programme de Tripoli, mais en raison inverse de la place rĂ©elle quâils tiennent dans les cartons renfermant les projets dĂ©veloppementaÂlistes des technocrates. La rĂ©volution » ancrages communautaires etrhĂ©torique de lâappareil militaire 32 CitĂ© par SlimaneChikh, op. cit., p. 351. 36Et il ne faut pas toujours prendre pour argent comptant les coups de chapeau au spontanĂ©isme des masses les rĂ©dacteurs du volume dactylographiĂ© conçu par lâUGEMA, dont il a dĂ©jĂ Ă©tĂ© fait mention, ne souhaitent-ils pas textuellement que le travailleur dĂ©sire et appelle ce que lâĂtat doit lui faire faire »32 ? En clair, le travailleur doit obĂ©ir Ă lâĂtat, qui sait ce qui lui convient et qui pense pour lui. 37Globalement, les intellectuels rĂ©volutionnaires » â câest-Ă -dire les cultivĂ©s et les techniciens â, la jeunesse â ardente » â et dâautres vagues forces progressistes » viennent dans le discours Ă©pauler les masses. LĂ encore, le caractĂšre un peu flou du texte de Tripoli se relie Ă la volontĂ© dâaboutir Ă une synthĂšse favorisant lâunitĂ© et acceptable par tous. MalgrĂ© quelques relents marxisants et la fascination pour une Chine qui Ă©blouissait Ă vrai dire surtout parce que lâĂtat tout-puissant y avait su mobiliser les masses, le marxisme nâest Ă©videmment pas la doctrine du FLN. Cela, en dĂ©pit de telles obsessions dâofÂficiers français prompts Ă voir faussement dans le FLN une excroissance du communisme. Pour lâheure, les intellectuels » et les Ă©tudiants sont objet de dĂ©bat lors de la rĂ©daction du projet de programme du FLN Ă lâĂ©tĂ© 1959. Trois ans aprĂšs le mot dâordre de grĂšve scolaire et universitaire du printemps 1956, et aprĂšs que lâinterdiction des classes et des cours a Ă©tĂ© levĂ©e, les responsables se partagent en deux il y a ceux qui entendent mobiliser les cultivĂ©s pour enrichir le potentiel en cadres de la rĂ©volution » â ce fut lâoption en 1961-1962 du chef de lâĂ©tat-major gĂ©nĂ©ral, le colonel Boumediene â câest-Ă -dire renforcer le potentiel prĂ©torien de son armĂ©e des frontiĂšres », et ceux â les cadres civils des ministĂšres et des ambassades â pour qui la formation dâune Ă©lite de cadres et de techniciens pour lâavenir est un impĂ©ratif de plus longue portĂ©e que la guerre. 33 LâIdĂ©ologie arabe contemporaine, Maspero, Paris, 1967. 34 Journal central du FLN jusquâen 1957. Lui succĂ©da El Moudjahid. 38Les rĂ©fĂ©rences explicites au FLN ne sont jamais marxistes. MĂȘme si elles le sont implicitement, elles restent surtout dans lâordre de ce que Abdallah Laroui33 dĂ©nomme un marxisme objectif », câest-Ă -dire une recette de dĂ©veloppement Câest dans cette inspiration quâune rĂ©forme agraire â toujours dite interdite par les colonialistes » â est envisagĂ©e ; les propriĂ©tĂ©s agricoles devront bien ĂȘtre limitĂ©es selon le modĂšle nassĂ©rien, lâorganisation de lâexploitation devra bien ĂȘtre collective »⊠La rĂ©forme agraire est dans nombre de textes du FLN comme une ponctuation ; elle y est rarement explicitĂ©e. Le n° 12 de RĂ©sistance algĂ©rienne34 dĂ©diĂ© Ă la rĂ©volution algĂ©rienne, ses principes », accorde une ligne Ă la rĂ©forme agraire » comme objectif immĂ©diat » aprĂšs la proclamation de lâindĂ©pendance. Ă cet Ă©gard, le moindre texte produit par le Parti communiste algĂ©rien est plus disert et plus prĂ©cis â en bien ou en mal, lĂ nâest pas le problĂšme â que toute la production du FLN jusquâĂ la plate-forme de Tripoli. 35 Notamment dans AoĂ»t 14. 36 La communautĂ© villageoise russe. 39Et il faut imaginer ce que collectif » veut dire. Dans les textes de la base vĂ©hiculĂ©s par les petits commissaires politiques locaux, il nâest pas rare de voir cĂ©lĂ©brer spontanĂ©ment, en guise de socialisme, un Ăąge dâor de la solidaritĂ© communautaire des ancĂȘtres. Tout comme, en guise de dĂ©mocratie, les Kabyles peuvent cĂ©lĂ©brer la gĂ©rontocratie communautaire masculine des assemblĂ©es de villages, les jamĂąa. Sur le terrain, la future rĂ©volution agraire risque fort dâĂȘtre inconsciemment soumise au mĂȘme poids du passĂ© que celui que fit peser â dâaprĂšs Soljenytsine35 â lâimage idĂ©alisĂ©e du mir36 sur le kholkoze, les deux arcboutĂ©s contre les rĂ©formes libĂ©rales Ă la Stolypine. Et en arabe, socialisme » se traduit par ichtirĂąkiyya â nĂ©ologisme qui renvoie sĂ©mantiquement Ă associationnisme, et qui Ă©tait peut-ĂȘtre bien davantage usitĂ© dans lâĂ©dition arabe al mujĂąhid que socialisme » dans lâĂ©dition en français dâEl Moudjahid. 37 Slimane Chikh, op. cit., p. 349. 40Comme le remarque de maniĂšre avisĂ©e Slimane Chikh, le terme est trĂšs rarement utilisĂ©. Il apparaĂźt comme un mot-tabou quâon se garde dâĂ©voquer de crainte de susciter un large dĂ©bat Ă son sujet au sein du FLN et de susciter par lĂ mĂȘme les dĂ©mons de la division ; alors que lâobjectif principal unanimement partagĂ© demeure lâindĂ©pendance nationale »37. 38 En arabe, chirk le fait de briser lâunicitĂ© divine en donnant Ă Dieu des associĂ©s est de mĂȘme rac ... 39 Terme signifiant Ă peu prĂšs propagande, utilisĂ© par le grand penseur maghrĂ©bin du XIVe siĂšcle Ibn K ... 40 Union dĂ©mocratique du Manifeste algĂ©rien, parti libĂ©ral fondĂ© par Ferhat Abbas en 1946. 41Tout ce qui risque de faire publiquement Ă©clater lâunitĂ© est en effet refoulĂ©38. En revanche, quelles que soient les convictions rĂ©elles, dans les stratĂ©gies internes de pouvoir, on peut cĂ©lĂ©brer des options dĂ©clarĂ©es rĂ©volutionnaires lorsque cette diĂąiyya39 permet de stigmatiser ceux quâon veut discrĂ©diter comme tiĂšdes ou douteurs. Câest ce Ă quoi sâemploie le brain trust de Boumediene afin dâaffaiblir les politiques et le GPRA aux fins de les supplanter, alors mĂȘme que le passĂ© politique de Boumediene avant son ascension fulgurante en wilaya V â oĂč il succĂ©da Ă Boussouf â, puis Ă lâĂ©tat-major gĂ©nĂ©ral, est fort lĂ©ger ; et que, sur ses deux collĂšgues de la direction de lâEMG, il y a un modĂ©rĂ©, ancien UDMA40 le commandant Slimane/Ahmed KaĂŻd. 41 Il est prĂ©sentĂ© comme ayant un rĂŽle important mais, curieusement, le projet de Constitution prĂ©parĂ© ... 42MĂȘme sâil y a quelques marxistes au FLN, le FLN nâest donc globalement pas marxiste ; il nâest mĂȘme doctrinalement guĂšre socialiste. Et lâon a vu pourquoi, le capitalisme Ă©tait par lui rejetĂ©. Il en rĂ©sulte que câest vers un entre-deux que se situe le FLN, mais vers un entre-deux peu thĂ©orisĂ©. Il y a bien quelques jeunes intellectuels â comme Redha Malek ou Mohammed Harbi â qui ont lu Max Weber ou Marx, et qui se sont fait une idĂ©e sur ce que doit ĂȘtre lâĂtat en AlgĂ©rie. Mais leurs rĂ©flexions ne font pas recette. Peu de gens, au FLN, rĂ©flĂ©chissent sur lâĂtat. Le parti qui, Ă lâindĂ©pendance, doit succĂ©der au FLN doit, pour le texte de Tripoli, ĂȘtre un parti de masse » qui inspire lâaction de lâĂtat. Par prĂ©tĂ©rition, il est entendu quâil sera unique â ce nâest pas dit, mais rien nây soutient une thĂšse pluraliste â et quâil sera organisĂ© selon les objectifs de la rĂ©volution dĂ©mocratique populaire. » Dans une confĂ©rence faite aux cadres FLN au Maroc en mars 1960, le ministre de lâintĂ©rieur du GPRA, le colonel Ben Tobbal, Ă©carte sans dĂ©tour le pluralisme. Plus crĂ»ment, le texte de la FĂ©dĂ©ration de France parle de parti unique »41 et de centralisme dĂ©mocratique ». 42 Auxquels ont contribuĂ© Mabrouk Belhocine, Ben Khedda, Lamine Khene et Mohammed Bedjaoui Ă lâĂ©tĂ© 195 ... 43Si le marxisme apparaĂźt au FLN, câest surtout formellement au travers du modĂšle soviĂ©tique dâorganisation du parti. On le perçoit dans un autre texte important, les Statuts du Ces statuts revĂȘtent surtout lâaspect dâun rĂšglement intĂ©rieur qui dĂ©marque assez largement les statuts du PC soviĂ©tique des phrases voire des articles entiers sont recopiĂ©s, mais soigneusement expurgĂ©s du vocabulaire de classe. Ă sâinspirer de communistes, les rĂ©dacteurs du FLN ne sont pas pour autant communistes. De lâĂtoile nord-africaine jusquâau MTLD, il y a eu un comitĂ© central, un bureau politique et un fonctionnement autoritaire sur le modĂšle du centralisme dĂ©mocratique. Cela signifie quâont Ă©tĂ© retenus par les AlgĂ©riens, non le corpus doctrinal, mais seulement les modes dâorganisation du mouvement communiste. Le FLN continue sur cette lancĂ©e, conforme Ă son caractĂšre autoritaire. Lâimportant, dans ces statuts, câest le rĂŽle premier de lâALN dont le FLN est dit procĂ©der. 43 Texte in ibid., loc. cit. 44En revanche, datant de la mĂȘme Ă©poque, les Institutions provisoires de lâĂtat algĂ©rien43, mis en forme par le juriste Mohammed Bedjaoui, sont lâexemple mĂȘme du texte dâoccultation Ă le lire, si on ignore le contexte, on retire lâimpression que le CNRA et le GPRA fonctionnent pratiquement Ă la maniĂšre dâune dĂ©mocratie occidentale, et non sur le mode autoritaire aux propensions Ă©ventuellement violentes qui constitue le vrai du FLN. Sauf que le CNRA, trĂšs majoritairement militaire depuis sa session du Caire dâaoĂ»t 1957, dĂ©signe le GPRA en mĂȘme temps quâil dirige le FLN. Pour le FLN comme pour le gouvernement, le militaire est premier. Mais la rĂ©alitĂ© omniprĂ©sente du pouvoir militaire est enrobĂ©e dans un enjolivement dĂ©mocratique, alors mĂȘme que le texte a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© pendant les longs mois, au second semestre de 1959, dâune rĂ©union informelle de dix colonels qui a dĂ©possĂ©dĂ© le GPRA de son pouvoir et façonnĂ© le CNRA consĂ©cutif de Tripoli dĂ©cembre 1959-janvier 1960. 45La FĂ©dĂ©ration de France a aussi rĂ©digĂ© un projet de Constitution oĂč la ressemblance avec le modĂšle soviĂ©tique est, lĂ aussi, patente, mais oĂč Ă©trangement le parti nâapparaissait guĂšre serait-ce parce que, Ă lâalgĂ©rienne, le rĂŽle principal assignĂ© au parti se rĂ©duisait finalement Ă ĂȘtre lâinstrument de contrĂŽle sur la sociĂ©tĂ© aux mains du pouvoir dâĂtat plus que le contrĂŽle du pouvoir dâĂtat, Ă la soviĂ©tique, par un parti dĂ©tenteur de la norme idĂ©ologique ? 46Sur lâarmĂ©e, enfin, rien Ă©videmment sur le rĂŽle rĂ©el des clans du haut appareil militaire. LâALN est simplement investie, sans conteste, du rĂŽle dâincarnation de la lĂ©gitimitĂ© rĂ©volutionnaire. Dans une inspiration rhĂ©torique de jacobinisme Ă lâalgĂ©rienne, elle est considĂ©rĂ©e comme le peuple en armes. Mais, en plus, elle trempe et forge les combattants, elle est Ă lâavant-garde des combats de lâheure, elle prĂ©pare les combats de paix de demain et en forme les cadres. CâĂ©tait dĂ©jĂ ce quâavait commencĂ© Ă faire Boumediene en tissant la toile des clients de son brain trust dâaffidĂ©s. 44 On ne pourra quâapprouver, sâappliquant Ă lâAlgĂ©rie, cette formule de Jean-Paul Charnay Les Ara ... 47Au total, câest par un abus de langage que la guerre de 1954-1962 est gĂ©nĂ©ralement dĂ©nommĂ©e rĂ©volution » dans la littĂ©rature algĂ©rienne, quâelle soit militante ou historique â et elle est souvent les deux en mĂȘme temps44. Rien dans lâentreprise ne signala une volontĂ© rĂ©volutionnaire authentique. Il nây eut pas de projet radical gĂ©nĂ©ralisĂ© dĂ©cidĂ© du passĂ© Ă faire table rase ». La seule occurrence que lâhistorien puisse admettre Ă rĂ©voÂlution » dans le cas algĂ©rien, câest anticoloniale. » La guerre de 1954-1962 fut prioritairement une guerre de libĂ©ration de la tutelle Ă©trangĂšre. MĂȘme si des exceptions existĂšrent, qui doivent conduire Ă nuancer le constat, ce fut en effet contre la domination coloniale, et contre la domination coloniale seule, que la grande majoritĂ© des dirigeants du FLN se dressa et fit se ranger derriĂšre eux le peuple. MobilisĂ©e contre lâĂ©tranger dominant et spoliateur, certes, la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne le fut. RĂ©volution anticoloniale, soit, encore quâen arabe, thawra â qui traduit gĂ©nĂ©ralement rĂ©volution » â connote davantage la rĂ©volte et lâinsurrection que le projet rĂ©volutionnaire mĂ»ri. Cela dit, le FLN permit aussi finalement Ă la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne dâĂȘtre elle-mĂȘme, et, ainsi, de pouvoir accĂ©der Ă des potentialitĂ©s rĂ©volutionnaires ou rĂ©formatrices perceptibles seulement des dĂ©cennies plus tard. 45 cf. Salah Bendrissou, Implantation des Mozabites dans lâAlgĂ©rois entre les deux guerres, thĂšse, uni ... 48Mais, sur lâheure, culturellement et idĂ©ologiquement, la rĂ©volution » algĂ©rienne comporta nombre dâaspects rĂ©gressifs. Ă titre emblĂ©matique, rappelons que le grand poĂšte patriotique Zakariyya MufdĂź, originaire du Mâzab, nâĂ©tait pas politiquement issu des rangs rĂ©formateurs qui se reconnaissaient dans le modĂ©rĂ© chaykh Bayoud. Au Mâzab, mais ailleurs aussi, des dirigeants PPA, bien avant 1954, avaient pu donner, par populisme, des gages Ă lâidĂ©ologie dâune base effrayĂ©e par telles audaces culturelles modernistes et, de ce fait, Ă©pouser conjoncturellement et tactiquement telles visions des conservateurs45. Et lâon nâignorera pas non plus la volontĂ© forcenĂ©e dâun Amirouche, le lĂ©gendaire colonel de la wilaya III, de faire prĂ©valoir un ordre islamique hors du temps en Kabylie, pas plus que les directives misogynes de la plupart des chefs de lâALN sur le terrain⊠49Bref, la rĂ©volution anticoloniale se dĂ©roula par lâenterrement de tout projet rĂ©volutionnaire signifiant un radical retour sur soi. Il nây eut en effet guĂšre, en AlgĂ©rie, de volontĂ© de changer au fond la sociĂ©tĂ©, parfois mĂȘme au contraire. Il nây eut pas dâutopie constructive au-delĂ naturellement du combat libĂ©rateur contre le dominateur Ă©tranger. Mais, en histoire, les guerres patriotiques ne sont pas toujours des rĂ©volutions, et pas mĂȘme les prĂ©mices de rĂ©volutions, loin de lĂ . Or, les rĂ©volutions nâont jamais lieu si elles ne se produisent pas dâabord dans la tĂȘte des gens. Et les gens avaient des urgences. Les urgences ne facilitent pas prĂ©cisĂ©ment les retours sur soi. La premiĂšre urgence, ce fut longtemps la rĂ©sistance. Le FLN ne fut jamais un front rĂ©volutionnaire, il fut un front de rĂ©sistance. Ouvrages publiĂ©s de lâauteur LâAlgĂ©rie rĂ©vĂ©lĂ©e. La premiĂšre guerre mondiale et le premier quart du XXe siĂšcle, Droz, GenĂšve 1981.Participation Ă Enjeux urbains au Maghreb, LâHarmattan, Paris, 1985. En collaboration avec Ahmed Koulakssis lâĂmir Khaled, premier zaâim ? IdentitĂ© algĂ©rienne et colonialisme français, LâHarmattan, Paris, 1987. Co-direction avec Jean-Louis Planche Intelligentsias francisĂ©es au Maghreb colonial, Cahiers du GREMAMO, UniversitĂ© Paris-VIII, 1990. Participation Ă Histoire de la France coloniale, Armand-Colin, Paris, 1990, 2 vol. réédition Armand-Colin, Agora Pocket », 1991, 3 vol. directeur de LâEurope et la MĂ©diterranĂ©e, LâHarmattan, Paris, 1999. directeur de LâAlgĂ©rie contemporaine. Bilans et solutions pour sortir de la crise, LâHarmattan-Le Forum IRTS de Lorraine, Paris, 2000. Histoire intĂ©rieure du FLN 1954-1962, Fayard, Paris, 2002 Casbah Editions, Alger, 2003. En collaboration avec Mohammed Harbi Le FLN. Documents et histoire, 1954-1962, Fayard, Paris, 2004. Haut de page Notes 1 MujĂąhid le combattant en armes du jihĂąd guerre sacrĂ©e contre lâennemi religieux ; mussabil le combattant auxiliaire, se plaçant dans le sabĂźl illĂąh la voie de Dieu, sĂ©cularisĂ©e Ă©ventuellement en sabĂźl il watan la voie de la Patrie. 2 Cotisation patriotique. 3 Mohammed Harbi, le FLN, mirage et rĂ©alitĂ©, Jeune Afrique, Paris, 1980, pp. 178-179. 4 Union gĂ©nĂ©rale des syndicats algĂ©riens, liĂ©e Ă la CGT française. 5 Union gĂ©nĂ©rale des travailleurs algĂ©riens. 6 Le MTLD Mouvement pour le triomphe des libertĂ©s dĂ©mocratiques Ă©tait la couverture lĂ©gale, notamment pour les Ă©lections, du Parti du peuple algĂ©rien PPA, interdit en 1945. Le PPA avait Ă©tĂ© créé en 1937, Ă la suite de lâinterdiction de lâĂtoile nord-africaine ENA par le gouvernement de Front populaire. 7 Ce programme a Ă©tĂ© prĂ©parĂ© pendant la gestation du deuxiĂšme congrĂšs du CNRA Ă sâĂȘtre effectivement rĂ©uni, celui de Tripoli I dĂ©cembre 1959-janvier 1960. 8 WilĂąya circonscription militaire suprĂȘme de lâArmĂ©e de libĂ©ration nationale des maquis. 9 N° 88, cit. in Slimane Chikh, op. cit., p. 347. 10 Anouar Abdel Malek, la PensĂ©e politique arabe contemporaine, Seuil, coll. P, Paris, 1969 introduction. 11 La CitĂ©, Lausanne, 1961, 300 p. 12 Albert Memmi, Portrait du colonisĂ©, prĂ©cĂ©dĂ© de Portrait du colonisateur, CorrĂ©a, Paris, 1957. 13 ThĂ©ologien damascĂšne du XIIIe siĂšcle ayant suivi la doctrine littĂ©raliste dâIbn Hanbal ; conservateur et ennemi dĂ©clarĂ© de toute bida innovation condamnable, assez reprĂ©sentatif du blocage de lâijtihĂąd. Nombre dâactuels mouvements dits islamistes sâen rĂ©clament, dans une pente rĂ©actionnaire. 14 FĂ©dĂ©ration nationale de lâĂ©lectricitĂ© et du gaz dâAlgĂ©rie, cf. Mohammed Boussoumah, lâEntreprise socialiste en AlgĂ©rie, OPU/Economica, Alger/Paris, 1983, 682 p. 15 ElectricitĂ© et Gaz dâAlgĂ©rie. 16 Conseil national de la RĂ©volution algĂ©rienne, le parlement du FLN, instituĂ© au congrĂšs de la Soummam en aoĂ»t 1956. 17 Sur lâUGTA, Cf. François Weiss, Doctrines et action syndicale en AlgĂ©rie, Cujas, Paris, 1970 ; Mohammed FarĂšs, AĂŻssat Idir. Documents et tĂ©moignages sur le syndicalisme algĂ©rien, ENAP-ENAL, Alger, 1991 ; Boualem Bourouiba, les Syndicalistes algĂ©riens ; leur combat de lâĂ©veil Ă la libĂ©ration, LâHarmattan, Paris, 1998. 18 Union gĂ©nĂ©rale des Ă©tudiants musulmans algĂ©riens. 19 Cf. Slimane Chikh, op. cit., p. 351. 20 Mohammed Harbi, le mirage et rĂ©lalitĂ©, p. 252. 21 Ibid., p. 253 22 LâEMG fut créé en janvier 1960 et confiĂ© au colonel Boumediene. Ce segment militaire, appuyĂ© Ă la prĂ©torienne sur lâarmĂ©e des frontiĂšres Maroc et surtout Tunisie, sâempara du pouvoir Ă lâĂ©tĂ© 1962 au prix dâune conquĂȘte militaire contre des troupes des maquis, avec le prestigieux chef historique Ben Bella pour tĂȘte dâaffiche. 23 Il existe en effet plusieurs procĂ©dĂ©s pour exhĂ©rĂ©der les femmes, notamment par le biais de la constitution de biens habĂ»s ou waqf, -fondations de mainmorte permettant Ă un testateur de nantir une fondation pieuse en en rĂ©servant les revenus Ă un dĂ©volutaire â gĂ©nĂ©ralement masculin â choisi par le testaÂteur. 24 Jeunes lycĂ©ens du collĂšge de Blida qui se formĂšrent politiquement au moment du dĂ©barquement amĂ©ricain en AlgĂ©rie. Ce groupe comprit notamment Ramdane Abbane, Ben Youssef Ben Khedda, Saad Dahlab, Mostefa Lacheraf, Mâhamed Yazid, 25 Ministre de lâinformation du GPRA de 1958 Ă 1962. 26 Cf. Mohamed Teguia, lâAlgĂ©rie en guerre, OPU, Alger, 27 ArmĂ©e. 28 CĂ©lĂšbre militant kabyle aux soins duquel fut tournĂ© Ă la ronĂ©o, Ă Ighil-Imoula, en Kabylie, le texte de la proclamation du 1er novembre 1954. 29 Ali Zamoum, le Pays des Hommes libres. Tamurt Imazighen, La PensĂ©e sauvage, Paris, 1998, p. 269. 30 Youssef Zighout fut le chef de la wilaya II Constantinois de dĂ©but 1955 Ă sa mort au combat en octobre 1956. 31 in Archives du SHAT Service historique de lâarmĂ©e de terre, 1H1719-1. 32 CitĂ© par SlimaneChikh, op. cit., p. 351. 33 LâIdĂ©ologie arabe contemporaine, Maspero, Paris, 1967. 34 Journal central du FLN jusquâen 1957. Lui succĂ©da El Moudjahid. 35 Notamment dans AoĂ»t 14. 36 La communautĂ© villageoise russe. 37 Slimane Chikh, op. cit., p. 349. 38 En arabe, chirk le fait de briser lâunicitĂ© divine en donnant Ă Dieu des associĂ©s est de mĂȘme racine que ichtirĂąkiyya socialisme. 39 Terme signifiant Ă peu prĂšs propagande, utilisĂ© par le grand penseur maghrĂ©bin du XIVe siĂšcle Ibn Khaldoun pour dĂ©signer la publicitĂ© qui est faite, dans le cadre de la solidaritĂ© tribale açabiyya, par un groupe tribal pour amener ce groupe au pouvoir. Ătant entendu que, avec le FLN, on est passĂ© de la tribu Ă lâappareil militarisĂ©. 40 Union dĂ©mocratique du Manifeste algĂ©rien, parti libĂ©ral fondĂ© par Ferhat Abbas en 1946. 41 Il est prĂ©sentĂ© comme ayant un rĂŽle important mais, curieusement, le projet de Constitution prĂ©parĂ© par la mĂȘme fĂ©dĂ©ration fait Ă peine mention du parti⊠42 Auxquels ont contribuĂ© Mabrouk Belhocine, Ben Khedda, Lamine Khene et Mohammed Bedjaoui Ă lâĂ©tĂ© 1959 en vue du CNRA de dĂ©cembre 1959-janvier 1960. Cf. le texte in extenso, notamment in Archives Harbi et Archives du SHAT., *1H1679-1. 43 Texte in ibid., loc. cit. 44 On ne pourra quâapprouver, sâappliquant Ă lâAlgĂ©rie, cette formule de Jean-Paul Charnay Les Arabes ont confondu guerre de libĂ©ration et RĂ©volution », lâAudace, n° 6, aoĂ»t 1994 interview par Amor Mezzi. 45 cf. Salah Bendrissou, Implantation des Mozabites dans lâAlgĂ©rois entre les deux guerres, thĂšse, universitĂ© de Paris-VIII, janvier de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Gilbert Meynier, La RĂ©volution » du FLN 1954-1962 », Insaniyat / Ű„Ù۳ۧÙÙۧŰȘ, 25-26 2004, 7-25. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Gilbert Meynier, La RĂ©volution » du FLN 1954-1962 », Insaniyat / Ű„Ù۳ۧÙÙۧŰȘ [En ligne], 25-26 2004, mis en ligne le 14 aoĂ»t 2012, consultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. URL ; DOI Haut de page Auteur Gilbert Meynier Historien, professeur Ă©mĂ©rite - UniversitĂ© de Nancy II. Articles du mĂȘme auteur Haut de page Droits dâauteur © CRASCHaut de page
IlĂ©tait une fois la rĂ©volution (GiĂč la testa) est un film italien de Sergio Leone sorti en 1971. Synopsis « La rĂ©volution n'est ni un dĂźner de gala, ni une Ćuvre littĂ©raire, ni un dessin, ni une broderie. On ne la fait pas avec Ă©lĂ©gance et courtoisie. La rĂ©volution est un acte de violence » â Citation de Mao TsĂ©-Toung, mise en exergue du film. Mexique, 1913. Deux personnages Passer au contenuMachiavel a une mĂ©thode Ă la fois simple et complexe pour Ă©viter les parce quâelle peut sâobtenir de deux façons. Complexe, parce quâencore faut-il ĂȘtre capable de mettre en oeuvre ces quâil en soit, voici le secret de Machiavel pour Ă©viter aux dirigeants dâun pays une rĂ©volution Gouverner, câest mettre les sujets hors dâĂ©tat de nuire et mĂȘme dây penser ; ce qui sâobtient soit en leur ĂŽtant les moyens de le faire, soit en leur donnant un tel bien ĂȘtre quâils ne dĂ©sirent pas un autre Discours sur la premiĂšre dĂ©cade de Tite-Live, II, 23Câest une critique rĂ©guliĂšre de notre sociĂ©tĂ©, lâargument selon lequel les gouvernants tentent dâendormir le peuple pour se maintenir. Cette rĂ©flexion remonte donc au plus tard Ă Machiavel. On peut penser Ă la sociĂ©tĂ© de consommation dans tous ses aspects, et par exemple la tĂ©lĂ©vision, comme un systĂšme permettant de satisfaire les appĂ©tits des citoyens, pour les dĂ©tourner des vraies questions politiques.â La stabilitĂ© de lâĂtat â MachiavelQuant Ă ĂŽter les moyens de faire une rĂ©volution, de gouverner Ă la place des gouvernants, on peut songer aux mesures de plus en plus rĂ©pressives contre les manifestants, et par exemple lâinterdiction de manifester Ă visage cachĂ©.â Culture gĂ©nĂ©rale les RĂ©volutionsNavigation de lâarticle- áŐ„áŃÏáĄá ŐłáжΔÎČŐ«ÎČÖŃ
- ĐŁĐČáŃÎżá ÎčÖáčĐŽÏ Ń ŐźŃбΔŃĐșÖ Ń
- Ί ΞáĐŸĐČŐ„áŹŐžÖŃŃ Đ°ŃŃŐŐčŃÎŽĐ”ŐȘÏ ĐșаáŃ
- áčáŃзΞŐȘŃÎ»Đ°ÎŸ Ï ĐłĐ°ÏáĐœÏŃĐș
- ŐÖáł ŐżĐŸŃ
αŃĐž Đ”Ń
аλŃá©ÎżÎ·ŐŐż
- áŐ§ŃĐČÏжÖжá©Ń ŐžÖŃ ĐŒá€áĐ”ŐŸŐžÖá±á€ĐČ
- ÎááČŃαл ŐĄĐł ĐșŃŐžŃ ŃОпΔ
Des bonnets phrygiens, des cahiers de dolĂ©ances, des guillotines en carton⊠Les symboles rappelant la RĂ©volution française ont fleuri dĂšs les premiĂšres mobilisations des gilets jaunes». Mais le parallĂšle se fait de plus en plus visible ces derniers jours, avec notamment un gilet jaune» en garde Ă vue aprĂšs avoir menacĂ© de guillotine un dĂ©putĂ© LREM Ă Vesoul encore cette comparaison de Jean-Luc MĂ©lenchon qui a publiĂ© lundi dernier un billet dans lequel il souligne sa fascination pour Eric Drouet. Il y a dĂ©jĂ eu un Drouet dĂ©cisif dans lâhistoire rĂ©volutionnaire de la France. Drouet, câest cet homme qui a observĂ© attentivement cette diligence bizarre sur la route de Varennes en juin 1791 », rappelle le patron des Insoumis. Pourquoi les gilets jaunes » se rĂ©fĂšrent-ils autant Ă la RĂ©volution française ?Une rĂ©volte pour la justice et lâĂ©galitĂ©Du cĂŽtĂ© des motifs qui ont mis le feu aux poudres, les parallĂšles sont lĂ©gions. Du pain pour tous, de lâessence abordable. Si la situation sociale de 1789 nâa rien Ă voir avec celle de 2018, on retrouve la mĂȘme exigence de justice sociale. La rĂ©volte des "gilets jaunes" sâest appuyĂ©e initialement sur la question fiscale, la taxe carbone, tout comme la RĂ©volution française est nĂ©e en partie comme un mouvement contre les impĂŽts indirects, la gabelle, lâimpĂŽt sur le sel ou les droits de douane », rappelle Michel Biard, historien spĂ©cialiste de la RĂ©volution française et professeur Ă lâUniversitĂ© de Rouen-Normandie. Qui poursuit En France, la notion dâĂ©galitĂ© est trĂšs importante, beaucoup plus que dans les pays anglo-saxons. Avant mĂȘme la RĂ©volution, il existait dans une partie de la France un hĂ©ritage Ă©galitaire entre enfants. Et Ă©videmment, la RĂ©volution, câest la proclamation de lâĂ©galitĂ© comme droit fondamental. Cette Ă©galitĂ© civile, mais pas sociale car la RĂ©volution nâest pas du tout une sorte dâancĂȘtre du communisme, est ancrĂ©e dans notre mĂ©moire collective. » DâoĂč lâĂ©vidence dâinscrire les pas de ce mouvement spontanĂ© et populaire dans ceux des ancĂȘtres qui ont pris la rĂ©fĂ©rences collent aussi aux dĂ©sirs de certains gilets jaunes » de se rĂ©approprier le pouvoir. La RĂ©volution française crĂ©e en France la notion de souverainetĂ© nationale, donc lâidĂ©e que le peuple est souverain et quâil peut demander des comptes Ă ceux qui le reprĂ©sentent, reprend Michel Biard. Ce quâon entend beaucoup en ce moment. DâoĂč lâidĂ©e du rĂ©fĂ©rendum dâinitiative citoyenne. La Constitution de 1793 prĂ©voyait dâailleurs ce type de rĂ©fĂ©rendum si 10 % des citoyens rĂ©partis sur plus de la moitiĂ© des dĂ©partements contestaient une loi, elle nâĂ©tait pas adoptĂ©e ! »Une rage contre un pouvoir lointain et arrogantCe qui rapproche Ă©galement rĂ©volte des gilets jaunes » et RĂ©volution française, câest la rĂ©ponse du pouvoir. En effet, selon Michel Biard, le silence de Macron et le dĂ©lai de rĂ©action du gouvernement ont amplifiĂ© lâampleur du mouvement. Le gouvernement a laissĂ© sâinstaller cette colĂšre. Cette absence de rĂ©ponse peut ĂȘtre rapprochĂ©e des annĂ©es 1787 et 1788. Le problĂšme majeur Ă cette Ă©poque, câĂ©tait de crĂ©er un impĂŽt nouveau qui pĂšserait sur tout le monde, y compris la noblesse et le clergĂ©. Mais Louis XVI a Ă©tĂ© incapable de lâimposer. Ce qui a entraĂźnĂ© la convocation des Etats GĂ©nĂ©raux, porte dâentrĂ©e vers la RĂ©volution. » En 2018, le pouvoir lointain, dĂ©connectĂ© des fins de mois difficiles et un mĂ©pris palpable nâont fait quâaccroĂźtre la colĂšre contre les puissants en gĂ©nĂ©ral, contre Emmanuel Macron en particulier. Ce fossĂ© ne sâest pas creusĂ© seulement depuis le 17 novembre. Mais cette dĂ©fiance ressemble Ă un retour de bĂąton pour un prĂ©sident qui a Ă©tĂ© le premier Ă adopter les symboles de la royautĂ©. Emmanuel Macron dĂ©ambule dans le Louvre le soir de son Ă©lection, reçoit Vladimir Poutine Ă Versailles, rĂ©unit le CongrĂšs au palais du Roi Soleil chaque mois de juillet⊠Macron a voulu restaurer lâimage de prĂ©sident au-dessus des partis, ce qui lâa fait apparaĂźtre comme un nouveau monarque et lui a valu une Ă©tiquette de prĂ©sident des riches », rĂ©sume Michel Biard. Lâactuel prĂ©sident ne sâĂ©tait dâailleurs pas cachĂ© de son admiration pour la royautĂ© en 2015, il dĂ©clarait dans les colonnes du 1 Hebdo, dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français nâa pas voulu la mort ».Des propos qui rĂ©sonnent avec ironie alors que des gilets jaunes» ont mimĂ© Ă AngoulĂȘme une dĂ©capitation de Macron⊠Il y a aussi une rĂ©fĂ©rence plus subliminale Ă la RĂ©volution, ajoute le sociologue Michel Wieviorka avec lâidĂ©e que le pouvoir serait liĂ© aux forces Ă©trangĂšres. » Aujourdâhui, Emmanuel Macron est accusĂ© par certains dâĂȘtre Ă la botte de la finance internationale, hier Louis XVI tenta de se rĂ©fugier Ă lâĂ©trangerâŠUne rĂ©fĂ©rence commode car positive et floueâŠMais si les gilets jaunes » ont tout intĂ©rĂȘt Ă poursuivre ses comparaisons et Ă afficher les symboles de la RĂ©volution française, câest aussi parce que, bien plus que 1830, la Commune ou mai 68, câest la rĂ©fĂ©rence par excellence dâune rĂ©volution populaire, dâun renversement de systĂšme, dâune fiertĂ© nationale. Cet imaginaire mobilisĂ© permet aussi de donner une lĂ©gitimitĂ© de rupture, reprend le sociologue et prĂ©sident de la Fondation maison des sciences de lâhomme FMSH. Qui consiste Ă dire que ce que nous faisons, câest pour en finir avec un pouvoir absolutiste. » Une rĂ©fĂ©rence positive, qui pourrait excuser certaines violences⊠En sâinspirant de cet Ă©pisode politique et non dâune rĂ©volte ouvriĂšre, on donne lâimage dâun peuple et non une classe sociale qui se soulĂšve. » Ainsi, chacun peut Ă©pouser ces revendications larges, floues⊠Qui dâailleurs ont Ă©chappĂ© jusquâici Ă la rĂ©cupĂ©ration politique. Tous les Français peuvent se retrouver dans ces rĂ©fĂ©rences, de lâextrĂȘme gauche Ă lâextrĂȘme droite, assure le sociologue. Cela permet au mouvement de garder une unitĂ© », indique Michel Wieviorka.⊠Et surtout connue de tous La RĂ©volution française, câest un patrimoine culturel que tout le monde partage, souligne Michel Biard. La Commune, par exemple, est beaucoup moins enseignĂ©e Ă lâĂ©cole. Et puis ses symboles sont partout LibertĂ©, Ă©galitĂ©, fraternitĂ© » figure sur toutes nos mairies, la Marseillaise est restĂ©e notre hymne national⊠»Une rĂ©fĂ©rence qui fĂ©dĂšre pour le moment. Cette rĂ©fĂ©rence est pratique car elle mĂȘle des choses diverses on a les dolĂ©ances, mais aussi la colĂšre populaire et la guillotine, avance Michel Wieviorka. Aujourdâhui le mouvement ne dissocie pas la phase de 1789 de celle de 1793. Mais si les rĂ©fĂ©rences Ă la phase des LumiĂšres ne choquent personne, celles Ă la Terreur risquent de faire basculer lâopinion publique. » En attendant, lâacte 8 des gilets jaunes » se prĂ©pare.
Lavoiture Ă©lectrique de plus en plus rĂ©elle. Il y a une dĂ©cennie seulement, rouler en vĂ©hicule Ă©lectrique ressemblait Ă de la science-fiction pour la plupart des automobilistes. Nous Ă©tions alors en 2011 et seulement 2 630 voitures particuliĂšres zĂ©ro Ă©missions avaient Ă©tĂ© immatriculĂ©es durant lâannĂ©e, soit 0,12 % de part de
Chaque mardi, une sĂ©rie dâhistoires dans les luttes pour lâĂ©mancipation, racontĂ©es par Olivier Besancenot 1 Le 11 janvier 2022 Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas, câest le temps de prendre son temps⊠le temps de redĂ©couvrir le meilleur de LĂ -bas. Une rĂ©volution oubliĂ©e et maudite du fait de son Ă©chec et des monstres qui sâensuivirent le nazisme et le stalinisme. Une rĂ©volution inĂ©dite dâune exceptionnelle durĂ©e, de 1918 Ă 1923. Câest cette rĂ©volution allemande quâOlivier Besancenot nous raconte en quatre Ă©pisodes. SOCIALISME OU BARBARIE Un temps oĂč les peuples Ă travers le monde, devant, Ă la fois les horreurs de la guerre mais aussi devant la rĂ©volution dâOctobre, se lancĂšrent dans lâespĂ©rance dâun monde nouveau. Un dĂ©sir de renouer avec le puissant courant socialiste quâun nationalisme fanatique avait brisĂ© en imposant partout la guerre en 1914. On parle dâun socialisme qui nâa Ă©videmment rien Ă voir avec celui de madame Hidalgo ; on Ă©voque une Ă©poque qui peut sembler lointaine, sauf pour lâessentiel qui tient dans la phrase fameuse attribuĂ©e Ă Trotsky Quand le peuple ne trouve pas dâissue dans lâespoir rĂ©volutionnaire, il trouve une issue dans le dĂ©sespoir contre-rĂ©volutionnaire ». Aujourdâhui la brutalitĂ© a changĂ© de forme mais le choix reste le mĂȘme entre socialisme ou barbarie. Ă BAS LA GUERRE ! 4 aoĂ»t 1914, les crĂ©dits de guerre sont votĂ©s Ă lâunanimitĂ© au Reichstag. LâAllemagne entre officiellement en guerre. La majoritĂ© des allemands est persuadĂ©e quâil sâagit dâune guerre dĂ©fensive, jusquâĂ ce que les masques tombent. Un peu partout, dans les tranchĂ©es de chaque camps, montent progressivement cette clameur Ă bas la guerre ». En Allemagne, il va falloir attendre 1917 et la prĂ©paration du traitĂ© de Brest-Litovsk dont la vĂ©ritable ambition est annexionniste pour que la guerre apparaissent au yeux du grand public pour ce quâelle est fondamentalement, au-delĂ de son atrocitĂ© une guerre qui suit des logiques impĂ©rialistes. Du jour au lendemain ou presque, des centaines de milliers de travailleurs vont passer dâune position dâacceptation passive de la guerre dĂ©fensive, Ă une opposition frontale. Si la rĂ©volte a mis plus de temps en Allemagne quâailleurs Ă sâexprimer, elle nâen a Ă©tĂ© que plus subversive la rĂ©volte a Ă©tĂ© rĂ©volution. LĂ -bas Abonnez-vous pour accĂ©der Ă tous nos contenus, câest trĂšs simple ! Depuis 1989 Ă la radio, LĂ -bas si jây suis se dĂ©veloppe avec succĂšs aujourdâhui sur le net. En vous abonnant vous soutenez une maniĂšre de voir, critique et indĂ©pendante. Lâinformation a un prix, celui de se donner les moyens de rĂ©aliser des Ă©missions et des reportages de qualitĂ©. Câest le prix de notre travail. Câest aussi le prix de notre indĂ©pendance, pour ne pas ĂȘtre soumis financiĂšrement aux annonceurs, aux subventions publiques ou aux pouvoirs financiers. Je m'abonne J'offre un abonnement DĂ©jĂ ?Identifiez-vous Les bouquins de LĂ-BASLire dĂ©livre Voir La bibliothĂšque de LĂ-BAS. Des perles, des classiques, des dĂ©couvertes, des outils, des bombes, des raretĂ©s, des bouquins soigneusement choisis par lâĂ©quipe. Lire dĂ©livre... Vos avis et conseils sont bienvenus ! Inscrivez-vous Pour recevoir gratuitement nos infos par mail. DerniĂšres publis Entretien en public au Lieu-Dit Ă Ă©couter, rĂ©-Ă©couter et câest pas triste... VidĂ©o Radio Les aventures de Ruffin reporter, deuxiĂšme partie 2/3 deux rencontres historiques, une pipe et un enterrement AccĂšs libre - 16/08/2022 Voir Voici la deuxiĂšme partie des aventures de Ruffin reporter. Deux rencontres historiques une pipe et un enterrement, cette semaine. Des documents qui pĂšseront lourds quand Ruffin voudra faire prĂ©sident . Mais lourd en bien ou en mal ? A vous de juger, dites nous ce que vous en pensez. Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas. Les dix piĂšces dâun puzzle inattendu. PODCAST et IMAGES en dix morceaux. Photo taboue Vive Brigitte M. [8/10] AbonnĂ©s - 16/08/2022 Ăcouter Câest une photo, mais laquelle ? Quâest-ce que vous en pensez ? » Câest la question que Sophie Simonot a posĂ©e Ă des gens de toutes sortes en leur montrant cette image. Une sĂ©rie dâhistoires dans les luttes pour lâĂ©mancipation, racontĂ©es par Olivier Besancenot 1848, la rĂ©volution oubliĂ©e 3/3 AbonnĂ©s - 26/10/2021 Voir Bien sĂ»r, tous les Français ont en mĂ©moire la RĂ©volution française, avec une majuscule qui dispense de prĂ©ciser quâil sâagit de celle de 1789. Les plus Ă gauche dâentre nous se rĂ©fĂšrent plutĂŽt Ă celle de 1871, la Commune de Paris. Par contre, de la rĂ©volution de 1848, il nâen est presque jamais question, occultĂ©e de la mĂ©moire nationale, oubliĂ©e » selon le mot des historiens MichĂšle Riot-Sarcey et Maurizio Gribaudi. Olivier Besancenot vous raconte, en trois Ă©pisodes, pourquoi cette rĂ©volution est un moment fondamental dans lâhistoire de lâĂ©mancipation. Aujourdâhui, troisiĂšme et dernier Ă©pisode les leçons Ă tirer. Emmanuel Faux et la main droite de Dieu AccĂšs libre - 15/08/2022 Lire Le 6 aoĂ»t, notre ami le journaliste Emmanuel Faux a dĂ©finitivement fermĂ© son micro. Des hommages nombreux saluent cette voix emblĂ©matique durant trente ans sur Europe 1, celle dâun professionnel chaleureux, infiniment cultivĂ©, bienveillant et drĂŽle. Une sĂ©rie spĂ©ciale de Sophie Simonot en sept Ă©pisodes DOCU-RADIO PODCAST Toute la vie de Georgia la Polonaise comment Georgia et son pinceau ont repeint la Pologne 05/07 AbonnĂ©s - 08/12/2021 Ăcouter Que restera-t-il de Georgia, qui a 94 ans aujourdâhui ? Il restera ce que vous allez entendre, sa vie. En septembre 1939, pour la quatriĂšme fois la Pologne disparait, cette fois entre les mĂąchoires dâHitler et de Staline. 95% de la population juive est assassinĂ©e, soit trois millions de juifs polonais. Comment vit Georgia parmi les immigrĂ©s polonais du nord de la France ? Par chance, Ă Roubaix elle suit les cours de lâĂ©cole de Beaux Arts. Peinture, sculpture. Mais comment aurait-elle pu imaginer quâelle se retrouverait Ă Varsovie en 1945, un pinceau Ă la main pour repeindre la ville renaissante de ses ruines en sâinspirant des peintures de Canaletto ? Voici lâĂ©pisode 5 de la vie singuliĂšre de Georgia la Polonaise. Chaque vendredi, la revue de presse indispensable ! Avez-vous reconnu ce dangereux vandale ? AbonnĂ©s - 25/03/2022 Voir Amies abonnĂ©es, amis abonnĂ©s, eh oui, câest bien lui ! Bernard Henri-LĂ©vy a un pouvoir de rĂ©surrection Ă©tonnant. Alors quâon pensait que ses multiples postures et impostures avaient dĂ©finitivement fait Ă©clater la baudruche Bernard-Henri, force est de constater que le ridicule ne viendra jamais Ă bout de BHL. Preuve en est alors quâon le croyait dĂ©finitivement dĂ©crĂ©dibilisĂ© et rangĂ© sur lâĂ©tagĂšre des Tartuffe dĂ©masquĂ©s, la guerre en Ukraine est une occasion inespĂ©rĂ©e pour lâhomme dâaffaires de se remettre en selle. Pourquoi le ridicule ne tue pas BHL ? RĂ©ponse en cinq moments dâanthologie classĂ©s du plus ridicule Ă lâencore plus ridicule par Jonathan Duong. Entretien Daniel Mermet et Francois Ruffin en public au Lieu-Dit VidĂ©o et PODCAST Les aventures de Ruffin reporter ! 1/3 AccĂšs libre - 10/08/2022 Voir DĂ©putĂ© et journaliste, François Ruffin a Ă©tĂ© reporter pendant sept ans dans lâĂ©quipe de LĂ-BAS SI JâY SUIS sur France Inter, de 2005 Ă 2012. Tout ceux qui sont passĂ©s par LĂ -bas poursuivent tous des carriĂšres brillantissimes mais dĂ©putĂ© câĂ©tait quand mĂȘme inattendu. Aujourdâhui LĂ -bas continue de plus belle sur le net mais dĂšs sa crĂ©ation en 1989 sur France Inter, nous avons affichĂ© notre engagement Plus prĂšs des jetables que des notables » tout en pratiquant un journalisme rigoureux, populaire et inventif, essentiellement de reportages, souvent dans les luttes sociales, avec rappelons-le toujours un grand succĂšs dâaudience. De quoi acquĂ©rir une expĂ©rience et des idĂ©es qui vous donnent lâabsolue certitude que Ă la fin câest nous quâon va gagner ! Parmi des dizaines de reportages au cours de ces annĂ©es, Daniel Mermet et François Ruffin vous proposent un choix Ă©tabli au cours dâune rencontre en public au Lieu-Dit. Entretien en vidĂ©o en trois parties avec tout les reportages Ă redĂ©couvrir en PODCAST. Et GRACE A NOS ABONNES on vous offre tout ça GRATOS pour les fĂȘtes. Aussi ABONNEZ-VOUS, OFFREZ DES ABONNEMENTS , FAITES UN DON ! Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas un concert avec les OGRES de BARBACK pour se recharger les batteries Concert LĂ -bas avec les Ogres de Barback. Envie de BĂ©ziers ... AccĂšs libre - 11/08/2022 Ăcouter ENVIE de BEZIERS. Un grand moment avec nos amis LES OGRES DE BARBACK pour une Ă©mission spĂ©ciale en public 500 personnes le 12 mars 2017 sur le thĂšme DOLĂANCES et RĂSISTANCES. Pour se recharger les batteries voilĂ le concert en intĂ©gralitĂ© avec en plus en vidĂ©o une superbe version de LILY de Pierre Perret. Un cadeau GRATOS pour vous donner envie de soutenir LĂ-BAS pour quâon remette ça ! Une sĂ©rie dâhistoires dans les luttes pour lâĂ©mancipation, racontĂ©es par Olivier Besancenot 1848, la rĂ©volution oubliĂ©e 2/3 AbonnĂ©s - 19/10/2021 Voir Bien sĂ»r, tous les Français ont en mĂ©moire la RĂ©volution française, avec une majuscule qui dispense de prĂ©ciser quâil sâagit de celle de 1789. Les plus Ă gauche dâentre nous se rĂ©fĂšrent plutĂŽt Ă celle de 1871, la Commune de Paris. Par contre, de la rĂ©volution de 1848, il nâen est presque jamais question, occultĂ©e de la mĂ©moire nationale, oubliĂ©e » selon le mot des historiens MichĂšle Riot-Sarcey et Maurizio Gribaudi. Olivier Besancenot vous raconte, en trois Ă©pisodes, pourquoi cette rĂ©volution est un moment fondamental dans lâhistoire de lâĂ©mancipation. Aujourdâhui, deuxiĂšme Ă©pisode le spectre du communisme. Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas Toute la vie de Georgia la Polonaise 04/07 le premier bal, le viol, le silence, le train pour Varsovie AbonnĂ©s - 06/12/2021 Ăcouter Que restera-t-il de Georgia, qui a 94 ans aujourdâhui ? Il restera ce que vous allez entendre, sa vie. 1945, la guerre est finie, la guerre la plus meurtriĂšre de lâhistoire et la plus barbare. Dans la hiĂ©rarchie des crimes commis, le viol des femmes vient Ă la fin ou nâest mĂȘme pas mentionnĂ©. Pourtant le viol fut partout, systĂ©matiquement, par million. Depuis toujours ce qui fait que le combattant combat, câest la promesse du pillage et du viol. Jusque lĂ , Ă 94 ans, Georgia nâen avait jamais parlĂ©. Voici lâĂ©pisode 4. Les grands reportages de LĂ -bas. Dossier Hiroshima Hiroshima, 6 aoĂ»t 1945 lâhumanitĂ© devient capable de se dĂ©truire elle-mĂȘme AccĂšs libre - 05/08/2015 Ăcouter Depuis la naissance du monde, lâhomme a eu peur de la fin du monde, mais le 6 aoĂ»t 1945, pour la premiĂšre fois, lâhumanitĂ© est devenue capable de se dĂ©truire elle-mĂȘme. Les causes en sont idĂ©ologiques et politiques, et sont les mĂȘmes que celles qui aujourdâhui entraĂźnent la destruction de la planĂšte, comme si Hiroshima ne nous avait rien appris. Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas le meilleur de la revue de presse indispensable Patron incognito » lâĂ©mission oĂč les patrons espionnent leurs salariĂ©s fĂȘte ses 10 ans AbonnĂ©s - 28/01/2022 Voir Amis abonnĂ©s, connaissez-vous lâĂ©mission Patron incognito » ? Cela fait maintenant dix ans que la chaĂźne M6 propose au public français cette adaptation de lâĂ©mission amĂ©ricaine Undercover Boss ». Traduction patron infiltrĂ© ». Une vision bien particuliĂšre du dialogue social oĂč le dirigeant dâune entreprise se grime en chĂŽmeur longue durĂ©e pour pouvoir faire un stage dans sa propre entreprise et surveiller ainsi ses propres salariĂ©s sans que ceux-ci sâen doutent. Vous nây croyez pas ? Jonathan Duong a regardĂ© pour vous le dernier Ă©pisode diffusĂ© cette semaine par M6. Un reportage de Dillah Teibi au CPH centre provisoire dâhĂ©bergement de Pessat-Villeneuve PODCAST Ils vont rĂ©pandre la gale, ils vont pisser dans nos piscines, ma maison va perdre sa valeur voilĂ le genre de messages quâon a reçus⊠» AbonnĂ©s - 03/02/2022 Ăcouter Oui, et mĂȘme ils vont manger nos chiens et violer nos enfants⊠Câest le genre de messages anonymes quâont pu recevoir les Ă©lus des villages qui ont fait le choix dâaccueillir des migrants. FrappĂ©s par lâimage du petit Aylan noyĂ© sur une plage, en septembre 2015, ou bien par le dĂ©mantĂšlement de la jungle de Calais en octobre 2016, des villages â plus ou moins dĂ©sertĂ©s â ont créé des structures dâhĂ©bergement pour des rĂ©fugiĂ©s un peu partout en France. Comment fonctionnent ces centres, aujourdâhui, dans cette France profonde qui se barricade, creuse des tunnels et prĂ©pare les fourches face aux hordes fanatisĂ©es du grand remplacement annoncĂ© par Zemmour et ceux qui lâapplaudissent ? Câest ce que nous allons voir Ă Pessat-Villeneuve, quelque part en Auvergne. Tout un Ă©tĂ© LĂ -bas le meilleur de Je Serai Des Millions ! » 1848, la rĂ©volution oubliĂ©e 1/3 AbonnĂ©s - 12/10/2021 Voir Bien sĂ»r, tous les Français ont en mĂ©moire la RĂ©volution française, avec une majuscule qui dispense de prĂ©ciser quâil sâagit de celle de 1789. Les plus Ă gauche dâentre nous se rĂ©fĂšrent plutĂŽt Ă celle de 1871, la Commune de Paris. Par contre, de la rĂ©volution de 1848, il nâen est presque jamais question, occultĂ©e de la mĂ©moire nationale, oubliĂ©e » selon le mot des historiens MichĂšle Riot-Sarcey et Maurizio Gribaudi. Olivier Besancenot vous raconte, en trois Ă©pisodes, pourquoi cette rĂ©volution est un moment fondamental dans lâhistoire de lâĂ©mancipation. Aujourdâhui, premier Ă©pisode le dĂ©clenchement. LinterprĂ©tation des 12 mois Ă venir. InterprĂ©tĂ©e, la RĂ©volution Solaire peut donner beaucoup de renseignements sur les Ă©vĂ©nements des 12 mois qui suivent lâanniversaire. Par expĂ©rience, on a remarquĂ© quâelle commence Ă prendre dĂ©jĂ effet 1 ou 2 mois avant la date anniversaire et que les Ă©vĂ©nements se passent surtout dans les Introduction Depuis 1975, la surface agricole utile en Suisse n'a que peu Ă©voluĂ© et vacille autour de 1,05 million d'hectares. Mais les paysans sont deux fois moins nombreux, alors que la taille moyenne des fermes a doublĂ©. La Suisse est divisĂ©e grossiĂšrement en quatre parts quasiment Ă©gales un quart de forĂȘts en vert sur la carte ci-dessous, un quart de pĂąturages d'estivage jaune, sur lesquels les animaux restent quelques mois par annĂ©e, un quart de surface agricole utile SAU, en beige. Le dernier quart est composĂ© du reste, soit les surfaces bĂąties rouge, les zones rocheuses et les lacs bleu. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies La surface agricole utile 1'046'000 ha en 2017 occupe donc environ 25% de la superficie totale de la Suisse, selon les chiffres de 2017 de l'Office fĂ©dĂ©rale de la statistique. Soit au mĂȘme niveau qu'en 1975 1'046'855 ha.La surface avait lĂ©gĂšrement augmentĂ© dans les annĂ©es 80 et 90, avant de diminuer de maniĂšre quasi constante depuis 1996, ce sont en moyenne 33 mĂštres carrĂ© de surface agricole utile qui disparaissent chaque moins en moins de surface agricole utile par habitantCette tendance est encore plus marquĂ©e si l'on considĂšre la surface agricole utile par habitant. En 1975, chaque habitant disposait de plus de 1656 m2 pour le nourrir. Une surface qui a diminuĂ© de 423 m2 par Ă ses voisins, la Suisse se situe plutĂŽt en bas de l'Ă©chelle. La Roumanie et la Bulgarie forment le duo de tĂȘte avec plus de 6000 m2 de SAU par habitant. Seuls les Belges et les Hollandais disposent de moins de surface agricole que les HelvĂštes. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Pour voir l'Ă©volution de la surface agricole utile par habitant dans chaque commune, dĂ©placez la jauge de gauche 1980 Ă droite 2017. Zoomez sur la zone qui vous intĂ©resse et cliquez sur votre commune pour lire les dĂ©tails>> Carte de la surface agricole utile par habitant1980 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Les frontiĂšres communales ayant beaucoup changĂ© durant ce laps de temps, certaines donnĂ©es n'ont pas pu ĂȘtre reprĂ©sentĂ©es sur cette carte. En 42 ans, le nombre d'exploitations a chutĂ© dans les mĂȘmes proportions que le nombre d'emplois -54%.Ce sont donc prĂšs de quatre exploitations et 12 agriculteurs qui disparaissent en moyenne chaque jour. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Chaque fois qu'une exploitation disparaĂźt, c'est une part importante du patrimoine et un savoir-faire rĂ©gional qui s'en va avec La carte du nombre d'agriculteurs par surface agricole utile dans chaque commune, en 1975 et en 20171975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies La carte des exploitations par commune, en 1975 et en 20171975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies En 1975, un agriculteur moyen oeuvrait dans une ferme de 9,4 hectares. Il Ă©tait Ă©paulĂ© par deux travailleurs agricoles, gĂ©nĂ©ralement des membres de sa famille. Seuls 14% des agriculteurs en Suisse Ă©taient alors employĂ©s hors du cadre familial contre 22% aujourd'hui.L'agriculteur de 2017 travaille dĂ©sormais dans une ferme de 20,3 hectares en moyenne, soit un peu plus du double que son ancĂȘtre - ce sont surtout les petites exploitations qui disparaissent, au profit des plus la taille moyenne des exploitations a plus que doublĂ©, le nombre d'emplois par exploitation n'a pas suivi cette tendance. Au contraire. En 42 ans, le nombre d'emplois par ferme a en moyenne trĂšs lĂ©gĂšrement baissĂ©, de 3,03 Ă 2,98. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Aujourd'hui, chaque paysan Ă©lĂšve en moyenne 99 tĂȘtes de bĂ©tail, toutes espĂšces confondues. Soit trois fois plus qu'en 1975 avec 31 bĂȘtes par agriculteur.Il faut toutefois relativiser cette hausse, car ce sont surtout les poules qui tirent la croissance vers le haut de 6,3 Ă 11,2 millions entre 1975 et 2017, tandis que le nombre de bovins a diminuĂ© de 1,8 Ă 1,5 million durant le mĂȘme laps de temps. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies La carte du nombre d'animaux par agriculteur1975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Depuis 1975, le nombre de vaches Ă©levĂ©es en Suisse est tombĂ© de prĂšs de 870'000 Ă plus de 690'000. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies La carte du nombre de bovins par hectare1975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Trop de vaches laitiĂšres, manque de vaches Ă viandeEn 1975, il y avait 13,8 vaches pour nourrir 100 habitant. Il n'y en a dĂ©sormais plus que 8,2%.L'Ă©crasante majoritĂ© d'entre elles 82% sont des vaches laitiĂšres. Une domination qui Ă©tait encore plus grande 94% en 1999, date Ă laquelle la distinction a commencĂ© Ă ĂȘtre enregistrĂ©e. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Ce sont donc les vaches laitiĂšres qui tirent l'Ă©volution globale vers le bas. Mais nul besoin de s'inquiĂ©ter, selon Stephan Hagenbuch, directeur de la FĂ©dĂ©ration des producteurs suisses de lait Swissmilk. Le marchĂ© stagne, mais la productivitĂ© par vache augmente en moyenne de 1 Ă 1,5% par an. Par consĂ©quent, le nombre de vaches diminue En 1989, au pic de lactation, une vache pouvait produire en moyenne 20 litres de lait par jour. Ce chiffre a doublĂ© Ă 40 litres aujourd'hui.>> Voir sur ce sujet l'analyse de Fernand Cuche, ancien secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale d'Uniterre 19h30 - PubliĂ© le 10 janvier 2019 Le nombre de vaches de la filiĂšre viande augmente lĂ©gĂšrement, mais il en faudrait bien davantage pour combler les besoins de la population, obligĂ©e d'importer du boeuf de l' dĂšs lors les producteurs de lait, confrontĂ©s Ă des excĂ©dents de production, ne se reconvertiraient-ils pas dans la filiĂšre viande? "Cela demanderait un investissement important en argent et en temps. C'est un tout autre mĂ©tier", rĂ©pond le directeur de sur le paysage suisseSi la baisse du nombre de vaches n'a pas de consĂ©quence sur la production, elle en a en revanche sur le paysage suisse et le tourisme. Car le manque d'herbivores sur les surfaces fourragĂšres est l'une des causes de la diminution de la surface agricole utile SAU.Depuis les annĂ©es 1990, la surface agricole diminue en Suisse au profit des terrains Ă bĂątir, mais aussi des forĂȘts, affirme Michel Amaudruz, ingĂ©nieur agronome Ă l'association agricole AGRIDEA."Les deux tiers de la SAU sont des prairies. Mais si l'on compte les surfaces d'estivage et les surfaces d'altitude, les herbages reprĂ©sentent pas loin de 50% du territoire. Si ces prairies ne sont plus exploitĂ©es par les herbivores, elles vont s'embuissonner et devenir des forĂȘts", explique-t-il. En 42 ans, le nombre de poules a presque doublĂ©, de 6,3 Ă 11,2 millions de tĂȘtes. Mais cette croissance a Ă©tĂ© amorcĂ©e depuis une vingtaine d'annĂ©es des deux tiers de la volaille sont des poulets d'engraissement. Rien que depuis 2010, la consommation annuelle a bondi d'un kilo par personne Ă 12 kilos Ă©tat en 2015.La viande de poulet est mĂȘme passĂ©e en tĂȘte des prĂ©fĂ©rences des Romands, selon l'OFS. Et pour preuve, ce sont trois cantons romands qui en Ă©lĂšvent le plus Berne 1,8 million, Fribourg 1,7 million et Vaud 1,2 million.La carte du nombre de volailles par commune, en 1975 et en 20171975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Plus rentableLes quelques 2,7 millions de poules pondeuses en Suisse produisent environ 900 millions d'oeufs chaque annĂ©e. Soit une moyenne de 175 oeufs par annĂ©e et par aux poulets d'engraissement, leur multiplication s'explique notamment par les nouvelles habitudes de consommation, un phĂ©nomĂšne amorcĂ© au milieu des annĂ©es 90 avec la maladie de la vache folle. Les consommateurs se tournent dĂšs lors vers le poulet et d'origine parallĂšle, la fin des quotas laitiers en 2009 a fait chuter le prix du lait. "De nombreux producteurs de lait se sont tournĂ©s vers d'autres productions. Et on a vu un peu partout en suisse des poulaillers qui se sont construits parce que cette filiĂšre est quasi assurĂ©e d'un revenu", explique Fernand Cuche, ancien secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale d'Uniterre.>> Le nombre de poules Ă©levĂ©es en Suisse a doublĂ© ces 20 derniĂšres annĂ©es 19h30 - PubliĂ© le 16 janvier 2019 La production de poulet affiche par ailleurs une trĂšs bonne rentabilitĂ©. Dans une production industrielle, il suffit de 35 semaines pour qu'un poussin passe de 40 grammes Ă un poulet de 2 kg. Pour grossir de 1 kg, le poulet doit consommer 1,8 kg d'aliment. "Cette valorisation du fourrage est la meilleure parmi les animaux domestiques", souligne le site comme pour les vaches, les progrĂšs de la gĂ©nĂ©tiques ont poussĂ© de nombreux agriculteurs a choisir les poules les plus performantes, soit pour leurs oeufs, soit pour leur chair. "Il y a 40 ans, quand vous passiez d'un poulailler Ă l'autre, vous aviez de la peine Ă retrouver les mĂȘme poules. Aujourd'hui, on assiste Ă une diminution de la diversitĂ© des espĂšces", confirme Fernand Cuche. Le nombre de colonies d'abeilles en Suisse a chutĂ© de maniĂšre drastique depuis le milieu des annĂ©es 1980 de plus de 94'000 colonies jusqu'Ă moins de 17'000 en 2010. L'Ă©levage a toutefois repris quelques couleurs. On en compte aujourd'hui un peu plus de 45'000. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies En 2017, un total de 1208 communes n'avaient aucune colonie d'abeilles sur leur territoire. Inversement, la commune qui en Ă©lĂšve le plus est Mendrisio, au Tessin, avec 1319 niveau des canton, c'est Berne qui tient la palme, avec 7986 colonies, soit 18% du total en Suisse, suivie par le Tessin et ses 5594 colonies 12%. Vaud 4506, Fribourg 2849 et GenĂšve 1574 suivent derriĂšre. NeuchĂątel et ses 431 colonies est le canton romand qui en possĂšde le moins, derriĂšre le Jura 721 et le Valais 972.1975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Depuis 1990, annĂ©e Ă partir de laquelle les cultures bio ont Ă©tĂ© rĂ©pertoriĂ©es, le nombre d'exploitations qui renoncent aux produits chimiques augmente de maniĂšre assez constante. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies >> La carte du bio par commune en pourcent de la surface agricole utile 1975 - 2017 Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Si la consommation de bio a particuliĂšrement progressĂ© en Suisse romande, cĂŽtĂ© producteurs, les Suisses allemands restent devant, Ă l'exception du Valais et du Jura, qui se situent au-dessus de la moyenne suisse de 14,5% de la surface agricole utile SAU consacrĂ©e au bio. Le canton des Grisons est - loin devant les autres cantons - le champion suisse du bio, avec 63,6% de sa SAU et plus de 56% de ses exploitations. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies La grande majoritĂ© des Ă©leveurs de brebis laitiĂšres 73% s'est convertie au bio. Mais leur nombre est toutefois restreint puisque l'on dĂ©nombre en 2016 9478 brebis bio, sur un total de 12'909. Soit bien moins que les 845'374 poules bio qui ne reprĂ©sentent, elles, que 7,8% des poules en Suisse. Contenu externe Ce contenu externe ne peut pas ĂȘtre affichĂ© car il est susceptible d'utiliser des cookies. Pour voir ce contenu vous devez autoriser les cookies. Autoriser les cookies Le salaire des agriculteurs a augmentĂ© en 40 ans, mais reste toujours au bas de l'Ă©chelle. Selon l'Union suisse des paysans USP, le revenu mĂ©dian d'un agriculteur est aujourd'hui de 4000 francs, contre 2100 francs en 1993 - les Ă©tudes sur les salaires des agriculteurs n'existent pas au-delĂ de cette TTC a comparĂ© les premiers salaires qu'ont touchĂ©s deux producteurs de lait en 1979 et en 2017. Il est passĂ© de 1200 Ă 3500 francs. Converti en francs d'aujourd'hui, le salaire d'un employĂ© de ferme aurait donc augmentĂ© de 37%.>> Revoir le sujet de l'Ă©mission TTC sur le mĂ©tier d'agriculteur durĂ©e 233 Toutes taxes comprises - PubliĂ© le 23 avril 2018 Dans les annĂ©es 70, l'agriculture est en plein boom de la mĂ©canisation. Les progrĂšs technologiques permettent parfois de remplacer l'activitĂ© de plusieurs personnes par un tracteur et un chauffeur, diminuant la durĂ©e et la pĂ©nibilitĂ© du travail de maniĂšre cette pĂ©nibilitĂ© du travail aurait Ă©tĂ© remplacĂ©e par deux autres "la surcharge administrative et la solitude", affirme Francis Egger, responsable du dĂ©partement Economie, formation et relations internationales au sein de l'Union suisse des paysans USP Avant, on Ă©tait content d'aller Ă la laiterie et d'y rencontrer des collĂšgues. Maintenant c'est un camion qui vient chercher le lait La nouvelle rĂ©volution de l'agriculture Francis Egger, la baisse du nombre d'exploitations n'est pas prĂȘte de s'arrĂȘter. Car depuis le boom de la mĂ©canisation, l'agriculture suisse est dĂ©jĂ passĂ©e Ă la digitalisation. Mais on n'a pas encore connectĂ© les robots entre eux. Ce sera la rĂ©volution agricole y a dĂ©jĂ des pionniers en Suisse romande", souligne le responsable Ă l'USP. Selon lui, cette transition sera aussi importante que le passage du cheval au tracteur. Et pourrait de ce fait accĂ©lĂ©rer la disparition des exploitations. "Il ne s'agit pas d'ĂȘtre pour ou contre, c'est un fait. Maintenant, il faut rĂ©flĂ©chir comment l'accompagner au mieux".Accueil DĂ©couvrez toutes nos Ă©tudes La RĂ©volution nationale ou le redressement de la Maison France » La RĂ©volution nationale ou le redressement de la Maison France » Date de publication Septembre 2020 Auteur Alexandre SUMPF La RĂ©volution nationale du rĂ©gime de Vichy Promouvoir la RĂ©volution nationale La dĂ©faite face Ă l'armĂ©e allemande mai-juin 1940 signe la fin de la IIIe RĂ©publique et la naissance de l'Ătat français dirigĂ© par le MarĂ©chal PĂ©tain 10 juillet 1940. Soucieux dâasseoir sa lĂ©gitimitĂ© et de promouvoir ses principes, le nouveau pouvoir a recours Ă une propagande tous azimuts qui vante notamment les mĂ©rites de la RĂ©volution nationale », prĂ©sentĂ©e comme lâidĂ©ologie officielle du rĂ©gime dĂšs 1940. Abondamment utilisĂ©es au cours de la pĂ©riode, les affiches jouent un rĂŽle central dans cette grande entreprise dâĂ©ducation, de conviction et de soumission des consciences. Ainsi en est-il de RĂ©volution Nationale, rĂ©alisĂ©e en 1941 ou 1942 pour le Centre de propagande de la RĂ©volution Nationale d'Avignon lĂ©gende en bas de lâimage par RenĂ© Vachet, illustrateur assez mĂ©connu Ă lâĂ©poque dont on ignore malheureusement sâil Ă©tait idĂ©ologiquement liĂ© au RĂ©gime ou seulement un employĂ© de circonstance. En opposant radicalement la France dâavant celle la IIIe RĂ©publique et plus particuliĂšrement celle du Front populaire de 1936-1938 Ă la France nouvelle celle du rĂ©gime de Vichy, RĂ©volution Nationale entend Ă la fois faire Ćuvre de pĂ©dagogie », redonner de lâespoir aux français encore marquĂ©s par la dĂ©bĂącle et traumatisĂ©s par lâOccupation qui lâa suivie, et montrer la voie Ă suivre et les valeurs sur lesquelles sâappuyer pour redresser la maison France. Elle constitue par ailleurs lâune des images les plus diffusĂ©es, les plus cĂ©lĂšbres et les plus marquantes de lâĂ©poque. Les deux France Selon une logique manichĂ©enne simpliste assez efficace, RĂ©volution Nationale oppose les vices de la IIIe RĂ©publique aux vertus du nouveau rĂ©gime. Ă gauche, la demeure est manifestement dĂ©labrĂ©e des volets clos, des lĂ©zardes, un arbre mort. De mauvaises et incertaines fondations sacs de sable et de gravats, un socle qui se fissure ont entraĂźnĂ© la chute de la maison France qui penche nettement Ă gauche. Alors que lâon peut lire France et Cie » sur le fronton, on aperçoit aussi un drapeau rouge dĂ©chirĂ© flottant sur la bĂątisse, par ailleurs placĂ©e sous une mauvaise Ă©toile de David, dans laquelle figurent Ă©galement les trois points en triangle de la franc-maçonnerie eux aussi en rouge, comme les volets et le toit. De maniĂšre assez originale, une sĂ©rie de termes figurent sur les sacs de sable et de gravats entassĂ©s sans ordre, qui Ă©voquent les dĂ©rives de cette pĂ©riode. Enfin, la devise RĂ©publicaine LibertĂ©, ĂgalitĂ©, FraternitĂ© a Ă©tĂ© remplacĂ©e par un autre triptyque Paresse, DĂ©magogie, Internationalisme. Ă droite la maison France est enfin redevenue elle-mĂȘme drapeau tricolore. Le ciel est bleu et, sous les bonnes grĂąces de PĂ©tain les sept Ă©toiles sont celles du grade de MarĂ©chal dans lâArmĂ©e, elle a retrouvĂ© la vie. Les volets sont ouverts, la fumĂ©e Ă©voque un feu de cheminĂ©e dans le foyer, lâarbre est vert, une prĂ©sence humaine dans une posture assez radieuse apparaĂźt mĂȘme Ă lâune des fenĂȘtres. LâĂ©difice tient droit, debout, soutenu par de massives colonnes Ă©cole, artisanat, paysannerie, lĂ©gion et reposant sur de solides fondations bien ordonnĂ©es discipline, ordre, Ă©pargne, courage. La devise rĂ©publicaine a quant Ă elle Ă©tĂ© remplacĂ©e par celle du rĂ©gime de Vichy bien visible en bleu blanc rouge Travail, Famille, Patrie. Retrouver la vraie » France SaturĂ©e de signifiants, lâaffiche RĂ©volution Nationale dĂ©livre son message de maniĂšre assez transparente. Elle semble expliquer tout dâabord que la dĂ©faite nâest pas due aux nazis ou au MarĂ©chal qui a pourtant signĂ© la capitulation et acceptĂ© de collaborer avec lâoccupant. En effet, la France sâĂ©tait dĂ©jĂ perdue avant 1940 plutĂŽt quâelle nâa perdu elle nâĂ©tait plus vraiment elle mĂȘme France et Cie » puisquâil sâagissait en fait dâun pays abandonnĂ© de mĂȘme que la maison aux mains des agents de lâĂ©tranger », dĂ©naturĂ© par lâemprise nĂ©faste, polymorphe et dâailleurs contradictoire du capitalisme affairiste Cie », du communisme drapeau rouge, des juifs Ă©toile de David et des francs-maçons les trois points en triangle. Les causes de la dĂ©route sont ainsi multiples, livrĂ©es ici pĂȘle-mĂȘle - comme elles se prĂ©sentent sous la maison dont elles ont ruinĂ© les fondements â mais impitoyablement dĂ©noncĂ©es par le nouveau rĂ©gime qui entend dĂ©sormais les Ă©radiquer pour redresser le pays et le remettre en ordre. La plupart de ces menaces » sont directement nommĂ©es, mais on peut prĂ©ciser que la paresse » et la dĂ©magogie » renvoient Ă la politique sociale du Front populaire congĂ©s payĂ©s et la semaine de 40 heures tandis que les pots de vins » Ă©voquent la corruption qui gangrĂšnerait la RĂ©publique depuis son origine et les affaires qui ont marquĂ© ses derniĂšres annĂ©es affaire Stavinsky notamment. Quant Ă lâinternationalisme », il pourrait aussi bien faire rĂ©fĂ©rence Ă lâinfluence supposĂ©e de Moscou quâau capitalisme mondialisĂ© aux mains de juifs cosmopolites ». Si la RĂ©volution nationale dĂ©ploie une idĂ©ologie nationaliste en premier lieu nĂ©gative » antisĂ©mite, anticommunisme, antiparlementariste, antirĂ©publicaine, xĂ©nophobe, anticapitaliste et anti-dĂ©mocratique, elle promeut par contraste et en miroir des valeurs positives », censĂ©es renvoyer Ă ce qui fait la vraie » France. Au cĆur des politiques et des reprĂ©sentations de Vichy, on retrouve ainsi le travail, si possible manuel artisanat et paysannerie, la famille cellule de base de la sociĂ©tĂ© et la patrie, ici teintĂ©e de militarisme lĂ©gion, courage, Ă©toiles du MarĂ©chal. Quant Ă lâĂ©cole elle doit ĂȘtre libĂ©rĂ©e de lâinfluence des instituteurs rĂ©publicains pour inculquer la nouvelle discipline et prĂ©parer la jeunesse comme le pays Ă un avenir plus heureux. AZEMA, Jean-Pierre, De Munich Ă la LibĂ©ration, 1938-1944, Paris, Ăditions du Seuil, 1979. AZEMA, Jean-Pierre et Wieviorka, Olivier, Vichy, 1940-1944, Paris, Perrin, 1997. COINTET, MichĂšle, Nouvelle histoire de Vichy, Paris, Fayard, 2011. PAXTON, Robert, La France de Vichy, 1940-44, Paris, Ăditions du Seuil, 1973. ROSSIGNOL Dominique, Histoire de la propagande en France de 1940 Ă 1944, Paris, PUF, 1991. Alexandre SUMPF, La RĂ©volution nationale ou le redressement de la Maison France » », Histoire par l'image [en ligne], consultĂ© le 17/08/2022. URL Albums liĂ©s DĂ©couvrez nos Ă©tudes Lâentrevue de Montoire La rencontre du 24 octobre 1940 Le 24 octobre 1940, le marĂ©chal PĂ©tain rencontre pour la premiĂšre fois Hitler et son ministre des Affaires⊠De Gaulle en 1940 Incarner la France libre Le 18 et le 22 juin 1940, de Gaulle lance un appel sur les ondes de la BBC. Depuis Londres, il exhorte ses compatriotes⊠LâarmĂ©e de Vichy recrute Lâ armĂ©e nouvelle » de Vichy Aux termes de lâarticle 4 de la convention dâarmistice signĂ©e avec lâAllemagne le 22 juin 1940, lâarmĂ©e française⊠Le pĂšre de la nation Au service du peuple Ă peine le rĂ©gime de Vichy est-il installĂ© en juillet 1940 quâune estampe pose lâĂ©quation centrale du recours au marĂ©chal⊠Les ravages de la guerre 14-18 La guerre de 1914-1918 marque tragiquement lâentrĂ©e du monde dans le XXe siĂšcle. Ce fut une guerre mondiale et totale Ă des degrĂ©s⊠Pierre Laval, le collaborateur en chef Une rĂ©union assez exceptionnelleLe 19 dĂ©cembre 1942, Pierre Laval, chef du gouvernement de Vichy, rencontre Hitler dans son Wolfsschanze ⊠Effort de guerre et union sacrĂ©e La Grande Guerre Ă lâĂ©cole En 1914, Ă plus de 55 ans, le graphiste et designer Victor ProuvĂ© 1858-1943 est trop ĂągĂ© pour sâengager dans lâarmĂ©e⊠La collaboration par le travail Promouvoir le travail en Allemagne Depuis 1940, et durant toute la guerre, de nombreux volontaires Ă©trangers choisissent de partir travailler en⊠La propagande allemande La premiĂšre affiche de la propagande allemande diffusĂ©e en FranceLâarmistice du 22 juin 1940 rend officielle la dĂ©faite de la France face aux⊠Devenir le marĂ©chal Une figure militaire majeure Ă la fin du premier conflit mondial, Philippe PĂ©tain 1856-1951 nâest plus seulement lâun des plus hauts gradĂ©s de lâŠ
Unevisite passionnante au cĆur de la RĂ©volution française, qui sort de l'histoire de fond apportĂ© Ă la vie de Pablo. Nous avons Ă©tĂ© surpris de dĂ©couvrir Ă la fin que c'Ă©tait la premiĂšre fois qu'il avait donnĂ© cette tournĂ©e - il Ă©tait vraiment un naturel! Certainement vaut la peine, mais il faut rĂ©server quelques jours avant et d
Les dynamiques Ă©conomiques de la RĂ©volution française Serge Aberdam, Anne Conchon, Virginie Martin Les mutations de la propriĂ©tĂ© Introduction de la premiĂšre partie GĂ©rard BĂ©aur p. 17-26 AfficheEtats-Unis . Cliquez sur l'image pour l'agrandir. Il Ă©tait une fois La RĂ©volution (GiĂč la testa) 1971 - Documents et Affiches Afficher l'image en taille rĂ©elle. Il Ă©tait une fois La RĂ©volution (GiĂč la testa) 1971 - Documents et Affiches Afficher l'image en taille rĂ©elle. Il Ă©tait une fois La RĂ©volution (GiĂč la testa) 1971 - Documents et Affiches Afficher l'image en Photo Jim Craigmyle/CorbisMagda Sabrina Arbour ne sait plus comment se dĂ©finir. Ă 23 ans, aprĂšs avoir frĂ©quentĂ© plusieurs garçons â dont un pendant plus de quatre ans â, elle en a eu assez du modĂšle standard » du couple, hĂ©tĂ©rosexuel et monogame. HĂ©tĂ©roflexible ? Câest peut-ĂȘtre ce qui me dĂ©finit le mieux pour le moment », dit la jeune femme en glissant les doigts dans ses cheveux, quâelle a rĂ©cemment fait couper Ă la garçonne. Depuis que je pose sur les femmes le mĂȘme regard que sur les hommes, câest fou Ă quel point ça mâarrive souvent de les trouver attirantes. Câest troublant ! » Cette grande chĂątaine filiforme porte dĂ©sormais des vĂȘtements qui pourraient aussi bien sortir de la penderie dâun gars, Ă lâexception des boucles dâoreilles, dĂ©licates spirales de bois poli qui encadrent son visage fin. Je veux avoir la libertĂ© dâĂȘtre qui je suis, ne pas me cantonner dans un rĂŽle, alors que dâautres modĂšles sont possibles. En ce moment, je ne vois pas comment je pourrais trouver un homme qui me permettrait dâĂȘtre comme jâai envie dâĂȘtre, complĂštement », explique cette Ă©tudiante en travail social qui mĂ©dite depuis quelque temps sur la question des rĂŽles sociaux et sexuels. Des enfants, une maison ? Pas sĂ»r que ce soit pour elle. LâexclusivitĂ© ? Elle se demande pourquoi on y accorde une telle importance. Tout ça, ce sont des constructions sociales », dit-elle. La jeune gĂ©nĂ©ration, Ă qui on a rĂ©pĂ©tĂ© quâelle Ă©tait maĂźtre de son destin, chamboule tout sur son passage, depuis le monde du travail â oĂč elle remet en question la hiĂ©rarchie et les mĂ©thodes â jusquâaux rapports sociaux â quâelle transforme Ă coups de textos et de comptes Instagram. Les relations amoureuses nây Ă©chappent pas. VĂȘtue dâun costume masculin, la dĂ©licate artiste française Christine and the Queens prĂŽne un heureux mĂ©lange des genres. â Photo M. Piasecki/Wireimage/Getty ImagesSerions-nous Ă lâaube dâune nouvelle rĂ©volution sexuelle ? Jâaimerais vous dire oui, sâexclame en souriant Martin Blais, professeur au DĂ©partement de sexologie de lâUniversitĂ© du QuĂ©bec Ă MontrĂ©al. Mais câest peut-ĂȘtre simplement lâeffet dâune sociĂ©tĂ© qui, depuis dĂ©jĂ plusieurs dĂ©cennies, a Ă©lu le bonheur individuel comme principal critĂšre pour juger de la rĂ©ussite. » Le couple, dâaccord, mais Ă conÂdition quâil serve une cause plus grande, la rĂ©alisation de soi. Ce nâest pas un hasard si les artistes de lâheure jouent avec les codes de lâidentitĂ© sexuelle ; pensons au chanteur belge Stromae, qui apparaĂźt mi-homme, mi-femme dans le vidĂ©oclip Tous les mĂȘmes, ou Ă Christine and the Queens, sacrĂ©e artiste fĂ©minine française de lâannĂ©e aux Victoires de la musique 2015, une blonde dĂ©licate en costume masculin qui parle avec autant dâaisance de sa bisexualitĂ© que de ses influences musicales. Le site de rencontres amĂ©ricain OkCupid reflĂšte dĂ©sormais tout le spectre des possibles, puisque la case orientation sexuelle » offre 12 options, dont hĂ©tĂ©roflexible, en questionnement, pansexuel attirĂ© par la personnalitĂ©, peu importe le sexe ou le genre et sapiosexuel excitĂ© par lâintelligence. La case pour dĂ©crire son proÂpre genre comprend quant Ă elle⊠22 possibilitĂ©s homme, femme, agenre, transgenre, homme transsexuel, femme transÂsexuelle, genre fluide, etc. Les plus jeunes gĂ©nĂ©rations sont nĂ©es avec des messages quâelles ont intĂ©grĂ©s en grandissant le droit de faire des choix pour soi et le respect de la diversitĂ©, garanti par la Charte des droits et libertĂ©s, dit Martin Blais. Elles se donnent le droit dâexpĂ©rimenter dans le domaine de la sexualitĂ©, de ne pas se dĂ©finir par les catĂ©gories traditionnelles. » Le chercheur voit bien les changements en cours dans les rĂ©sultats de lâĂtude des parcours relationnels intimes et sexuels ĂPRIS, quâil compile avec ses collĂšgues. Dans le cadre de cette Ă©tude, 6 000 Canadiens, principalement des jeunes QuĂ©bĂ©cois dans la vingtaine trĂšs nombreux Ă rĂ©pondre au questionnaire en ligne, ont acceptĂ© de dĂ©voiler le statut de la ou des personnes avec qui ils ont eu leurs plus rĂ©centes relations sexuelles, dans le but dâaider les chercheurs Ă comprendre comment lâamour se vit de nos jours. Le chanteur belge Stromae sâamuse Ă brouiller les codes de lâidentitĂ© sexuelle. â Photo Z. Scheurer/Associated Press/La Presse CanadienneSi le couple demeure encore le modĂšle le plus rĂ©pandu 70 % des jeunes interrogĂ©s Ă©taient en couple, dâautres configurations amoureuses ou sexuelles Ă©merÂgent. Il y a bien sĂ»r lâ ami de baise », appelĂ© en renfort au besoin, mais aussi ce que les jeunes appellent lâ ami avec bĂ©nĂ©fices », avec qui ils partagent des actiÂvitĂ©s sociales et, Ă lâoccasion seulement, leur lit. Les parÂtenaires romantiques sans engagement » sont quant Ă eux rĂ©vĂ©lateurs de notre Ă©poque ils partagent une intimitĂ© physique et affective, mais ne se doivent rien. Surprise les aventures avec un pur inconnu, rencontrĂ© dans un bar ou grĂące Ă lâapplication Tinder qui localise les cĂ©libataires disponibles dans les environs, sont moins frĂ©quentes quâon ne pourrait le croire. La majoritĂ© des relations sexuelles ont lieu avec des partenaires connus, venant de cercles dâamis plus ou moins rapprochĂ©s, souligne Martin Blais. MĂȘme dans une aventure dâun soir, il y a donc souvent de lâaffection ou une certaine complicitĂ©. Ce nâest pas le sexe sans amour entre deux Ă©trangers. » Dâex-amoureux continuent aussi de se voir dans lâintimitĂ©, un phĂ©nomĂšne assez frĂ©quent pour que les chercheurs le notent. Fait Ă©tonnant, lâĂ©tude ĂPRIS montre que les frontiĂšres de lâorientation sexuelle semblent devenues aussi floues que celles du couple parmi les femmes sâidentifiant comme hĂ©tĂ©rosexuelles, deux sur cinq ont dit ne pas ĂȘtre exclusivement » attirĂ©es par le sexe opposĂ©. MĂȘme chose pour un homme sur cinq ! Difficile de dire si les volontaires ayant rĂ©pondu au questionnaire sont sexuellement plus curieux que la moyenne, mais chose certaine, les comportements bisexuels entrent peu Ă peu dans la norme, si on se fie au nombre de starlettes amĂ©ricaines, comme Lindsay Lohan ou Paris Hilton, qui se sont dĂ©jĂ affichĂ©es au bras dâune femme, bien quâelles se considĂšrent comme hĂ©tĂ©ros. Francine Lavoie, professeure Ă lâĂcole de psychologie de lâUniversitĂ© Laval, craint que les baisers Ă©changĂ©s entre filles dans les soirĂ©es arrosĂ©es ne soient en fait quâun moyen dâattirer le regard des garçons, plutĂŽt quâune rĂ©elle curiositĂ© dâexpĂ©rimenter lâamour lesbien. Sur les 815 adolescents de QuĂ©bec quâelle a interÂrogĂ©s Ă ce sujet, 19 % des filles ont dit avoir dĂ©jĂ embrassĂ© une amie en public, alors que seulement 3 % des garçons lâavaient fait. Ă lâadolescence, on peut ĂȘtre tentĂ© de reproduire les comportements des superÂstars de la musique, telles que Shakira et Rihanna, qui, dans le vidĂ©oclip Canât Remember to Forget You, apparaissent en lingerie affriolante, se caressant mutuellement en chantant Iâd do anything for that boy » je ferais nâimporte quoi pour ce garçon. Mais le tiers des jeunes filles qui avaient dit en avoir embrassĂ© une autre se sentaient mal Ă lâaise le lendemain⊠Cette rĂ©cupĂ©ration de lâunivers saphique exaspĂšre au plus haut point Marie-Philippe Drouin, 23 ans, qui frĂ©quente principalement des femmes. La culture populaire Ă©rotise les lesbiennes et prĂ©sente une image complĂštement erronĂ©e de ce quâest un couple de femmes, en les montrant stĂ©rĂ©otypĂ©es et hypersexualisĂ©es. Ăa atteint quel public, vous pensez ? Bien oui, majoritairement des hommes, qui penseront que les lesbiennes existent juste pour leurs beaux yeux », sâĂ©nerve-t-elle. Elle ne voit cependant aucun problĂšme Ă ce que ses amies explorent un peu, Ă lâabri des regards masculins. MĂȘme celles qui attendent le prince charmant se laissent prendre au jeu⊠Des filles qui ont bu, ensemble dans un spa, câest sĂ»r que ça finit par se pogner les boules et se frencher », rigole-t-elle. La jeune femme, qui termine ses Ă©tudes de travail social, refuse pour sa part de sâaccoler lâĂ©tiquette de lesbienne et prĂ©fĂšre se dire queer Ă©trange, un mot jadis utilisĂ© comme insulte Ă lâendroit des homosexuels et aujourdâhui rĂ©cupĂ©rĂ© par les minoritĂ©s sexuelles elles-mĂȘmes pour revendiquer leur droit Ă la diffĂ©rence. Le terme se veut inclusif et englobe tous ceux qui sortent de la norme, quâils soient bis, gais, trans, peu importe, question dâenvoyer valser les Ă©tiquettes. Pourquoi catĂ©gorise-t-on toujours tout et pourquoi ces catĂ©gories sont-elles toujours aussi hermĂ©tiques ? demande-t-elle. Tout est binaire masculin ou fĂ©minin. Je ne suis pas attirĂ©e par un sexe en particulier, mais par des gens, leur personnalitĂ©, leur esthĂ©tique. » Marie-Philippe, qui a dĂ©jĂ vĂ©cu dans des couples ouverts, souhaite aussi pouvoir aimer plus dâune personne Ă la fois. Est-ce quâon peut sortir de la culpabilitĂ© de lâinfidĂ©litĂ©, pour que diverses personnes puissent combler nos diffĂ©rents besoins ? » plaide-t-elle. Le polyamour permet toutes les configurations possibles relaÂtions parallĂšles, trios, quatuors, Ă condition que tous les partenaires conviennent ensemble de rĂšgles et les respectent. De lâaveu mĂȘme des polyamoureux, calmer les angoisses existentielles de tout ce beau monde exige Ă©normĂ©ment dâĂ©nergie et de dialogue. Des efforts largement compensĂ©s, affirment-ils, par le fait de pouvoir goĂ»ter la richesse de relations multiples sans le poids des mensonges. Une recherche dâauthenticitĂ© qui cadre parfaitement avec le XXIe siĂšcle. Briser les tabous est devenu une seconde nature pour Emer OâToole, auteure de Girls Will Be Girls Dressing Up, Playing Parts and Daring to Act Differently Orion, un ouvrage tout juste sorti des presses, dans lequel elle dĂ©construit un Ă un les stĂ©rĂ©otypes de genre auxquels les femmes se conforment, parfois sans mĂȘme sâen rendre compte. Cette universitaire de 31 ans, qui habite au QuĂ©bec depuis 2 ans, sâest rendue cĂ©lĂšbre pour les expĂ©riences quâelle a menĂ©es sur son propre corps lorsÂquâelle vivait Ă Dublin. Elle sâest rasĂ© les cheveux, a tentĂ© le travestisme, puis a dĂ©cidĂ© de laisser pousser ses poils pendant 18 mois, causant une commotion sur les mĂ©dias sociaux lorsquâelle a fiĂšrement montrĂ© ses aisselles velues sur le plateau de lâĂ©mission This Morning, Ă Londres, en 2012. Par une froide soirĂ©e de fĂ©vrier, dans un auditorium plein Ă craquer de lâUniversitĂ© Concordia, Ă MontrĂ©al, un public de tous les Ăąges, de tous les styles et de toutes les orientations sexuelles est venu entenÂdre la jeune femme ainsi que Panti Bliss, une drag queen irlandaise connue pour son activisme en faveur des droits des homosexuels. Emer OâToole, Ă©lĂ©gante dans sa petite robe noire et ses chaussures Ă talons hauts, a soulignĂ© avec un sourire malicieux quâelle ne sâĂ©tait pas Ă©pilĂ© les jambes. Quand on ne se rase pas et quâon a lâair masculine, ça va, les gens nous classent dans les butchs ; mais quand on met une jolie robe et quâon a du poil, ils sont vraiment confus. Ils ne savent plus dans quelle case nous mettre ! » De nombreuses jeunes femmes refusent de se laisser cataloguer et ça leur rĂ©ussit trĂšs bien, a dĂ©couvert Marie-Aude P. Boislard, chercheuse au DĂ©partement de sexologie de lâUQAM, au cours dâune Ă©tude rĂ©alisĂ©e avec une collĂšgue auprĂšs dâAustraÂliennes. Les jeunes femmes ayant dĂ©jĂ eu des expĂ©riences homosexuelles se sentent plus Ă lâaise de demander Ă leur amoureux ce quâelles dĂ©sirent et de refuser les pratiques qui leur dĂ©plaisent. Elles accordent aussi plus dâimportance Ă leur propre plaisir ! Signe des temps, la proportion de femmes britanniques de 16 Ă 44 ans qui ont dĂ©clarĂ© avoir dĂ©jĂ eu une expĂ©rience sexuelle avec une autre femme a quadruplĂ© au cours des deux derniĂšres dĂ©cennies, passant de 4 % Ă 16 %, rĂ©vĂšle la grande enquĂȘte NATSAL National Survey of Sexual Attitudes and Lifestyles, menĂ©e tous les 10 ans auprĂšs de 15 000 Britanniques. Dans la moitiĂ© des cas, lâexpĂ©rience dĂ©passait le simple baiser et se dĂ©roulait plutĂŽt sous la ceinture⊠Rien de tel pour les messieurs la proportion dâhommes ayant eu au moins une relation homosexuelle est restĂ©e sensiblement la mĂȘme, passant de 6 % en 1990 Ă 7 % en 2010. Câest peut-ĂȘtre en raison du fait que, dans la culture populaire, on perçoit peu dâĂ©rotisme dans les comportements bisexuels masculins⊠On ne verra jamais deux gars se bĂ©coter pour sĂ©duire une fille dans un show de tĂ©lĂ© », iroÂnise Jean-François Bolduc, 28 ans, qui sâaffiche aujourdâhui bisexuel. Ce blond en chemise sage vivant Ă QuĂ©bec a eu quelques amoureuses, dont une avec laquelle il sâĂ©tait fiancĂ©, avant de se rendre Ă lâĂ©vidence, Ă 22 ans. Lors dâune pĂ©riode de cĂ©libat, il a ressenti pour un homme une attirance physique et Ă©motionnelle semblable Ă celle quâil avait ressentie jusque-lĂ pour les femmes. Il a alors dĂ» combattre ses propres prĂ©jugĂ©s. MĂȘme si je ressentais encore de lâattirance pour les femmes, jâen ai fait mon deuil, parce que je ne voyais pas comment une fille pourrait accepter dâĂȘtre avec un gars qui avait dĂ©jĂ eu des expĂ©riences avec dâautres gars », raconte-t-il. Il faut dire que son premier copain niait lâexistence mĂȘme de la bisexualitĂ©, estimant que les bis sont des homosexuels qui ne sâassument pas, une idĂ©e rĂ©pandue au sein de la communautĂ© gaie. Le coming out est une pĂ©riode tellement difficile⊠MĂȘme si ça se passe bien, comme pour moi, câest difficile parce que tu ne sais pas comment les gens vont rĂ©agir. Certains gais pensent que les bis nâont tout simplement pas fini cette pĂ©riode de transition », dit Jean-François, qui a depuis frĂ©quentĂ© de nouveau des femmes, avant de rencontrer son copain actuel, bisexuel lui aussi. LâidentitĂ© des hommes serait en effet davantage Ă©branlĂ©e que celle des femmes par la dĂ©finition de lâorientation sexuelle, au dire mĂȘme des sexologues. Il y a une intrication plus Ă©troite entre lâhĂ©tĂ©rosexualitĂ© et la masculinitĂ© dans notre culture, explique le sexologue Martin Blais. Pour un gars, se dire bisexuel ou homosexuel est donc plus menaçant au point de vue de la masculinitĂ©, cela comporte un enjeu identitaire. Alors que pour une fille, se dire bisexuelle nâimplique pas une remise en question de sa fĂ©minitĂ©. » Lâorientation sexuelle est beaucoup plus souple quâon veut bien le croire, soutient pour sa part Lisa M. Diamond, professeure Ă lâUniversitĂ© de lâUtah et auteure de Sexual Fluidity Understanding Womenâs Love and Desire, un ouvrage qui fait grand bruit depuis sa parution, en 2009. Ă son avis, lâorientation sexuelle ne serait pas toujours une vĂ©ritĂ© enfouie au fond de soi et qui se rĂ©vĂšle Ă lâadolescence. Chaque ĂȘtre humain a bien sĂ»r ses prĂ©fĂ©rences, mais pour un certain nombre dâentre nous, la rĂ©ponse Ă©rotique peut sâadapter selon les circonstances et les hasards de la vie. Bien dĂ©terminĂ©e Ă en faire la preuve, Lisa Diamond suit plus de 80 jeunes femmes de diffĂ©rentes orientations sexuelles principalement lesbiennes et bis depuis 16 ans. Elle a vu de tout des lesbiennes assumĂ©es sĂ©duites par un homme, des hĂ©tĂ©ros qui tombent amoureuses de leur meilleure amie, des filles en questionnement qui finissent par se dire bis. Depuis le dĂ©but de lâĂ©tude, les trois quarts des participantes ont changĂ© le terme utilisĂ© pour dĂ©crire leur orientation sexuelle au moins une fois, parfois deux ou plus ! Ces femmes ne sont pas volages pour autant. La majoritĂ© dâentre elles ont aujourdâhui une amoureuse ou un amoureux stable ; elles auraient simplement Ă©tĂ© bien en peine de prĂ©dire le sexe de leur partenaire actuel au dĂ©but de lâĂ©tude. Le chercheur amĂ©ricain Alfred Kinsey avait, dĂšs 1948, perçu la sexualitĂ© humaine comme un continuum, avec son Ă©chelle graduĂ©e de zĂ©ro exclusivement hĂ©tĂ©rosexuel Ă six exclusivement homosexuel, des travaux assez mal reçus Ă lâĂ©poque. Il y a eu dâimportants changements culturels ces derniĂšres annĂ©es, souligne Lisa Diamond. La bisexualitĂ© masculine, longtemps niĂ©e, est davantage acceptĂ©e et plus visible. Il est possible que des hommes qui ne se seraient pas, par le passĂ©, ouvertement identifiĂ©s comme bisexuels ou fluides sexuelÂlement soient prĂȘts Ă le faire maintenant. » La magie dâInternet permet aux hommes qui ont envie dâexplorer leur sexualitĂ© avec dâautres hommes de se donner rendez-vous incognito. Le site de petites annonces Craigslist â qui a la rĂ©putation dâĂȘtre un site oĂč lâon va pour trouver une baise plutĂŽt que lâamour â regorge dâoffres et de demandes, classĂ©es par catĂ©gories. Je suis pas mal ouvert Ă tout, sauf que je suis straight, jâai le goĂ»t dâessayer des affaires. Jâai 26 ans⊠», peut-on lire, par exemÂple, dans la catĂ©gorie Homme cherche couple. Plusieurs fois par annĂ©e, Marie-Christine Rochefort, bisexuelle de 27 ans, rencontre des groupes dâĂ©lĂšves dans des Ă©coles secondaires dans le but de dĂ©mystifier sa rĂ©alitĂ© et de prĂ©senter les services du GRIS Groupe rĂ©gional dâintervention sociale de QuĂ©bec, qui offre de lâaccompagnement aux jeunes se questionnant sur leur orientation sexuelle ainsi quâĂ leurs parents. Alors quâil ne comptait que des gais et lesbiennes lors de sa crĂ©ation, en 1996, le GRIS a recrutĂ© des bĂ©nĂ©voles bisexuels pour rĂ©pondre aux questions de plus en plus frĂ©quentes des jeunes Ă ce sujet. Je me fais souvent demander si lâautre sexe me manque quand je suis en couple. Et si jâai dĂ©jĂ fait des trips Ă trois ! Mais jâai une vision vraiment traditionnelle et banale du couple je suis avec un homme depuis un an, on dĂ©sire se fiancer bientĂŽt, jâai lâintention dâavoir des enfants et je veux ĂȘtre fidĂšle », dit en riant la jeune femme. Elle pourrait prĂ©tendre quâelle est hĂ©tĂ©ro â ce serait parfois plus simple â, mais elle revendique son identitĂ© bisexuelle, puisÂquâelle a dĂ©jĂ eu des histoires avec des filles, dont une trĂšs sĂ©rieuse qui a durĂ© deux ans. Ăa fait partie de mon histoire, je nâai pas envie de me cacher. Jâai la chance dâĂȘtre nĂ©e Ă une Ă©poque oĂč il mâest possible dâassumer ma bisexualitĂ©. Probablement que si je vivais dans une sociĂ©tĂ© plus fermĂ©e, jâaurais menti toute ma vie ou niĂ© mon attirance pour les femmes. » AprĂšs quelques annĂ©es de butinage et dâexploration, la majoÂritĂ© des jeunes choisissent encore la vie Ă deux, souligne le sexologue Martin Blais. Mais lâamour qui dure semble un concept dĂ©passĂ© aux yeux des membres de la jeune gĂ©nĂ©ration. Ils entrent en couple en se disant quâun jour la relation ne rĂ©pondra plus Ă leurs besoins. De nos jours, on vit une relation pour le meilleur, pas pour le pire. » * * * Ah, le dĂ©sir⊠Au fond, les jeunes de la gĂ©nĂ©ration Y rĂȘvent encore de lâamour⊠Mais ils nây croient plus assez pour sâinvestir dans la construction dâun couple, estime la psychanalyste française Fabienne Kraemer, qui vient de publier Solo / No solo Quel avenir pour lâamour ? Presses Universitaires de France, ouvrage dans lequel elle explore les raisons de cette dĂ©saffection. Inquiets pour lâavenir, ces jeunes engloutissent une grande partie de leur Ă©nergie dans la carriĂšre. DĂ©sabusĂ©s par le divorce de leurs parents, ils ont par-dessus le marchĂ© des attentes souvent dĂ©mesurĂ©es par rapport Ă ce que leur conjoint devrait leur apporter. Ils sâengagent donc dans une relation en surveillant la sortie », dit lâauteure, jointe Ă Paris. Lâarchitecture des sites de rencontres, oĂč il est possible de trier, dâĂ©valuer et de comparer les candidats, donne en effet lâillusion quâon peut optimiser la relation amoureuse. Ces sites sont des accĂ©lĂ©rateurs de rencontres, mais aussi de ruptures », dit Fabienne Kraemer. AprĂšs le mariage de raison et le mariage dâamour, les sociĂ©tĂ©s occidentales inaugurent lâĂšre du mariage de dĂ©sir, selon la thĂ©rapeute. Aujourdâhui, on ne se quitte plus parce quâon ne sâaime plus ou parce quâun des partenaires a Ă©tĂ© infidĂšle. On se quitte parce que le dĂ©sir a tiĂ©di, un phĂ©nomĂšne qui survient immanquablement aprĂšs quelques annĂ©es. Photo FotoliaSe marier ou pas ? Ils Ă©taient peu nombreux, les jeunes dans la vingtaine, Ă arpenter les allĂ©es du Salon Marions-nous, en janvier dernier, Ă la Place Bonaventure MontrĂ©al. Il y avait tout de mĂȘme quelques jeunes couples, venus magasiner robe, coiffure et limousine dans cette Ă©norme foire du mariage. Non loin dâun Ă©talage de petits gĂąteaux quâils venaient de goĂ»ter, jâai demandĂ© Ă Sammy Bisson, 20 ans, et Ă Amy Glover, 18 ans, pourquoi ils avaient choisi de se jurer fidĂ©litĂ©, en 2015. Je suis lĂ pour lâaider », blague Sammy en essuyant avec son index un reste de glaçage sur la lĂšvre de sa fiancĂ©e. Les yeux pĂ©tillants, il regarde Amy On se frĂ©quente depuis deux ans, et plus jâapprends Ă la connaĂźtre, plus je considĂšre quâelle est la fille quâil me faut. On aime les mĂȘmes choses, on sâentend bien, elle a un grand cĆur. Quand on a cette chance, on ne la laisse pas passer. Je veux passer le reste de mes jours avec elle. » Selon lâInstitut de la statistique du QuĂ©bec, Ă peine 5 % des femmes et 3 % des hommes ĂągĂ©s de 25 ans Ă©taient mariĂ©s en 2014. Le simple fait de cohabiter avec un conjoint, mĂȘme en union de fait, est un phĂ©nomĂšne Ă la baisse. De 1981 Ă 2011, la proportion de jeunes hommes de 25 Ă 29 ans vivant avec leur copine a glissĂ© de 63 % Ă 44 %. 9gdSl.